L'histoire :
Début du XXe siècle. François, cafre et ancien fils d’esclave, revient en compagnie de son ami Max sur l’île de la Réunion qui l’a vu naître. Ni l’un ni l’autre ne savent exactement ce qu’ils sont venus trouver à Maison rouge, la belle demeure de la famille de Max. Sans doute cherchent-ils à saisir un parfum d’enfance, ou à comprendre leurs racines ? Débarrassée de l’esclavagisme, l’activité de l’île n’a plus le même faste qu’autrefois. La jungle a repris ses droits, et pour oublier qu’on s’y ennuie ferme, on descend volontiers des bouteilles de rhum. D’un côté, Max décide d’être le premier à construire un aéroplane. Le pilote d’essai est tout trouvé : ce sera François. D’un autre côté, cette bonne poire de François se laisse manipuler par deux vauriens qui veulent déterrer le trésor du pirate Jean Bouin. Pour cela, ils ont volé une carte dans la bibliothèque de Maison rouge, et passent à présent le plus clair de leur temps à regarder François creuser, en buvant du rhum. Solitaire entre ces deux activités, François fait des rencontres instructives. Le jour, c’est une jeune indienne qui lui narre l’histoire de sa famille. Et chaque nuit, il se laisse conter l’incroyable vie du flibustier Jean Bouin, par son fantôme…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au terme du diptyque, un maître mot résume à lui seul cette histoire : nostalgie. Au même rythme un peu indolent que pour le premier tome, le héros passif François se laisse porter par les évènements. Il fait pilote d’essai, se laisse conter de tristes épisodes du passé, se fait exploiter pour creuser un trou… Il lui faudra attendre d’être assommé à l’issu de cette collaboration douteuse pour faire montre d’une mini-tentative de rébellion, vite avortée. Cet état d’esprit, plus proche de l’hédonisme que de l’oisiveté, exprime en tout cas parfaitement la mentalité des îles créoles. Appollo ne cherche pas à nous étonner avec un scénario sophistiqué : son histoire simple respire la poésie d’une île qu’il affectionne visiblement (il est déjà l’auteur de la Grippe coloniale). Cette quête de soi sert donc avant tout de support à nous faire partager une multitude de parenthèses délicates : l’histoire du père de l’indienne, celle de Jean Bouin, les dialogues avec le cabri, les fantômes du passé, la chasse au trésor, le premier vol en avion… L’ensemble est mis en relief par l’étonnant Li-An, plus connu pour être le dessinateur réaliste du Cycle de Tschaï. L’artiste change ici de technique pour emprunter un style plus moderne, plus éthéré, parfaitement en phase avec l’onirisme de la narration. Une belle histoire, un peu triste…