L'histoire :
En cet automne 1852, les parisiens Honoré et Camille sont de retour dans leur Bretagne natale, à Kerfilec, petit port de pèche situé face à l’île de Dourduff. Malgré les années, certains au village les ont reconnus et les jaseries vont bon train. Si Honoré a laissé derrière lui une image de romantique – tout le village était au courant de son amour pour Emma – les habitants sont étonnés de le voir aujourd’hui marié à Camille Desfhouet, « la » Desfhouet, au tempérament plus calculateur et mesquin. Evidemment, cela se serait sans aucun doute passé différemment si Emma n’était pas jadis morte en mer… Quand Louis annonce cette visite à mademoiselle Hortense, l’institutrice de l’école Capucine, qui a fait l’école à tout ce petit monde enfant, Hortense renifle le mauvais coup. Elle n’a pas d’autre choix, elle craint pour Louis (?) et elle lance donc un sortilège. Aussitôt, une faille se crée dans l’espace temps, lors de laquelle Honoré et Emma, adolescents, jouent dans la cours d’école. Cependant, on dirait qu’un bug survient : Honoré, l’adolescent du passé, se retrouve par moments incrusté dans le présent ! il se retrouve notamment face à son double adulte et se voit en compagnie de Camille, et non d’Emma, ce qui le dégoûte. Il consulte donc son institutrice, qu’on dit un peu nécromancienne, pour avoir confirmation de cet avenir révoltant. Hélas…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Des secrets tragiques et enfouis parmi les membres d’une petite communauté, resurgissent à l’occasion du retour d’exil au village d’un de ses membres… » Cet archétype du thriller rural, scénarisé par Jean-Blaise Djian, constitue la trame centrale de ce nouveau diptyque. Néanmoins, alors que tout se met en place de manière relativement classique, avec beaucoup de non-dits et de tensions, Djian injecte un ingrédient inattendu de fantastique : paradoxe spatio-temporel ( !) … et fait basculer son histoire dans un registre non identifié, et soudainement beaucoup plus rafraichissant. Quelque part entre la chronique villageoise à suspens et le conte ésotérique bretonnisant, se dégage surtout une véritable ambiance, notamment grâce au dessin de Vincent (qu’on a notamment déjà pu apprécier dans Albatros). Agrémenté par la jolie colorisation de Delf, l’artiste livre 54 premières planches très agréables à suivre, dans un style graphique semi-réaliste d’une belle maîtrise. Certes, on ne comprend pas tout… mais c’est tout à fait volontaire et normal, au vu du nombre de mystères dont le scénariste prend soin d’entourer son intrigue. A quelle logique obéit cette brèche dans l’espace-temps ? Quelles potentialités s’offrent pour le dénouement prévu au prochain tome ? Ce mélange des genres peut s’avérer tout autant casse-gueule que génial… Seule la seconde partie le dira.