L'histoire :
Septembre 1962, c’est le temps de la récolte dans les vignobles de Restigné. La main d’œuvre est rare et les coups bas entre viticulteurs pour débaucher les ouvriers des concurrents vont bon train. Deguelo n’hésite pas à proposer des primes aux salariés de son voisin Renard, pour qu’ils viennent vendanger dans sa propriété. Ulcéré par cette provocation de trop, Renard ne compte pas en rester là. Pour se venger de ce nouvel affront, il décide, accompagné de ses 2 fils, d’aller, durant la nuit, arracher un carré de vigne de son cher voisin. Averti de ces intentions malveillantes, Déguelo, aidé de quelques ouvriers, décide alors de monter la garde afin de surveiller les agissements de ses concurrents. Au moment où il s’installe dans une cabane de chasse appartenant à Renard, Déguelo déclenche par inadvertance un mécanisme qui provoque une violente déflagration qui le pulvérise. L’ampleur de l’explosion meurtrière sidère les 2 camps rivaux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au cœur d’un village, où la rivalité entre vignerons est exacerbée, un jeune curé débarque pour y occuper son premier ministère. Enfin libéré d’une mère possessive, le père Pierre Ferra qui pensait prêcher dans une paroisse tranquille, peuplée d’âmes charitables et bienveillantes, va rapidement perdre ses illusions. Dans un monde rural où tous se connaissent, ce meurtre est propice à l’expression des bassesses de l’âme humaine. Chacun y va de petits sous-entendus qui amplifient les rumeurs, les dénonciations anonymes des bons citoyens se multiplient, le tout contribuant à plomber une atmosphère déjà pesante. Initialement paru en 1997, cette réédition d’un des premiers ouvrages de Rabaté est un petit bijou. Au-delà d’une intrigue bien menée, au dénouement surprenant, l’auteur caricature avec verve et beaucoup de justesse la campagne française de l’époque. Malgré le contexte dramatique de ce polar provincial, c’est un ouvrage truffé d’humour (parfois grinçant) avec des personnages hauts en couleur et plutôt attachants (ou pas), comme on pourrait les trouver dans les films de Chabrol ou de Clouzot. Le trait noir et épais de Rabaté pour cet ouvrage monochrome réalisé à l’encre de Chine, est d’une classe impeccable, restituant avec finesse ce récit campé dans le réel. Une BD incontournable s’il en est, à découvrir ou à redécouvrir.