L'histoire :
Alec Macgarry est le double de papier de l’auteur de BD Eddie Campbell. Sorte de personnage en négatif, Alec mène une vie où l’absurde le dispute à l’excentrique. Tout commence alors qu’Alec est employé dans une aciérie du sud de l’Angleterre dans les années 70. Il y rencontre Danny Grey avec lequel il partagera de mémorables soirées bitures et défonce au pub The King Canute ; qui d’ailleurs commenceront avec de la bière et se finiront au vin. Plus tard, sa vie amoureuse décousue se terminera par un mariage et un voyage en Australie. Encore plus tard, entre discussions avec la crème de la BD anglophone, regard critique sur From Hell et émergence du « graphic novel », il racontera l’histoire de la BD en cette fin de 21ème siècle. Et finira par être rattrapé par tous les problèmes ordinaires que peuvent rencontrer les pères de famille responsables : achat d’une maison, enfants à élever, gestion d’une petite maison d’édition à l’équilibre financier fragile… En ressort le portrait cocasse teinté d’ironie d’un homme en quête de création, autant intéressé par la réflexion sur l’Art que par les soirées beuveries farfelues. Alec, c’est tout à la fois l’autobiographie d’un auteur en formation, d’un père de famille et d’un artiste attachant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour la plupart des lecteurs, Eddie Campbell est seulement le fabuleux dessinateur du chef-d’œuvre réalisé avec Alan Moore, From Hell. Mais Campbell est aussi un artiste complet, capable de raconter sa vie de créateur avec distance, ironie et sens de l’autodérision. Dans cette intégrale qui regroupe toute la série des Alec réalisée entre 1981 et 2002, soit six histoires (publiées au sein de quatre albums en France) plus une inédite, Campbell y narre la vie de son double de papier, un alter-ego dans l’Angleterre des années 70 : auteur en quête d’identité artistique rattrapé par la paternité et la crise de la cinquantaine, submergé par les responsabilités d’adulte, il raconte souvenirs de jeunesse et déboires amoureux, sans omettre les discussions autour de From Hell ou les soirées bitures au King Canute ; bref, la matière des Alec est foisonnante. Sans jamais sombrer dans le pensum narcissique, l'auteur y déploie au contraire une verve très british faite de cynisme et de cocasserie, appuyée par une finesse et une intelligence de dialogues qui transforment une vie presque banale en expérience de lecture grisante. Car Alec, toujours au cœur de situations incongrues, ne quitte jamais une enthousiasmante et communicative gaieté. Une forme d’humour très british à rapprocher de l’absurde anglais, le nonsense. D’accès difficile au premier abord (650 pages quand même), cette intégrale mérite néanmoins une place de choix dans votre bédéthèque. Car après un petit effort, la belle plume et le regard excentrique de Campbell devraient finir par vous séduire. A la croisée de l’essai, de la fresque sociale et de l’autobiographie enlevée, une belle intégrale en noir et blanc.