L'histoire :
Misery loves Comedy est un recueil de publications antérieures, rassemblant les trois premiers volumes de la série Schizo ainsi que des travaux divers réalisés de 1992 à 2003. Tout commence par une introduction rédigée par Karen M. Schneider, psychothérapeute de l’auteur. C’est une invitation à la clémence envers le travail de l’auteur, celui-ci présentant des troubles de la personnalité (serait-il Schizo ?). On y croise ensuite des monologues médisants sur le sens de l’existence, un père alcoolique et violent, un fœtus-avorton qui se la pète, stumpy l’adorable poly-amputé, Denis La Malice et son père présentés dans d’étranges positions, les états d’âmes de sa femme Valérie ou encore des correspondances entre Ivan Brunetti et ses amis dessinateurs R. Crumb et Daniel Clowes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ivan Brunetti, à l’image des auteurs Daniel Clowes ou Chris Ware, fait partie de cette brillante génération d’auteurs indépendants américains des années 90. Soyons clairs, soit vous saluerez le chef-d’œuvre soit vous détesterez, tant les scènes présentées vont à rebours des habitudes les plus enracinées. Par ses dessins trash et violents (dont le trait s’inspire de Peanuts, Charles Schulz), ses tirades résolument empreintes de mal de vivre, Ivan Brunetti dérange, choque, scandalise mais ne laisse pas indifférent. Il y développe de manière obsessionnelle des thématiques métaphysiques et philosophiques tels que la haine de soi et du genre humain, le désespoir, l’absurdité de l’existence, la bêtise des hommes et leur propension à vivre dans le mensonge. Il y dénonce aussi les contrats sociaux que sont le mariage et la famille, en insistant sur leur caractère illusoire au regard du bonheur recherché. Il y nourrit par ailleurs des fantasmes d’autodestruction et de suicide collectif. Un programme ô combien désespérant et nihiliste, mais où le lecteur a la furieuse impression de nager dans le réel. Ce recueil s’impose comme un monument de la BD indépendante américaine par son absence de compromis, son humour dévastateur et finalement, son sens aigu de la réflexion. Chris Ware, auteur du chef d’œuvre Jimmy Corrigan dit de lui « qu’il demeure le secret le mieux gardé de la bande dessinée américaine ». Respect.