L'histoire :
Fritz a tout du parfait glandeur, en plus d'être un érotomane sans scrupules. Fritz revient donc un beau jour à la maison. Passées les embrassades de circonstances avec sa mère (dont il se fout pas mal), Fritz décide d'aller se baigner avec sa sœur avant de lui sauter dessus... Plus tard, il prétexte « une contamination satanique » pour s'introduire chez une vieille maman et rencontrer sa fille : le tout nouveau « Sanct-o-spray » devrait permettre de la purifier elle et sa famille. Une proie de plus pour Fritz... Plutôt qu'étudier, Fritz préférerait faire la fête et coucher jusqu'à n'en plus finir... Mais, lorsqu'une nana lui propose de la bière, Fritz joue l'âme tourmentée et torturée pour mieux se faire désirer. Or elle le trouve très cool ! Deux secondes plus tard, feignant la connivence, Fritz est amoureux ! Ah l'amour est une drôle de chose, vraiment... Bref, pour un peu de sexe, Fritz est prêt à tout, quitte à devenir SDF...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L'un des traducteurs, Jean-Pierre Mercier, retrace dans une introduction utile la généalogie de Fritz. Personnage anthropomorphe sans doute le plus connu du « Pape de l'underground », son héritage et son identité telle que l'envisageait Crumb ont été dévoyés par le réalisateur Ralph Bakshi, qui a décidé d'en faire le héros d'un dessin animé à succès classé X. C'était en 1972. Une hérésie, une trahison pour le père de Fritz. Pas grave pour autant, ce 13ème volume de l'anthologie Crumb vient remettre les choses à leur place, avec le récit des pérégrinations fantasques d'un chat paillard, obsédé sexuel ô combien paresseux. Antihéros par excellence, Fritz enfile les costumes à l'envi : étudiant glandeur, espion foireux ou terroriste maladroit, faux intellectuel muni d'une pensée en kit, fier chômeur et père irresponsable, le chat louvoie et se faufile pour mieux happer ses proies, toutes féminines. Grotesque séducteur, fanfaron impénitent et médiocre interprète de son propre rôle, Fritz avance libre muni d'un bric-à-brac philosophique : tour à tour sérieux, rêveur, romantique, faux dur, penseur de pacotille ou révolutionnaire en carton-pâte, il n'a qu'un but : séduire et forniquer. A coups de bluff et d’esbroufe. Derrière l'image d'un chat si médiocre qu'il en devient attachant, se dessine en fait une critique sans illusions, aigre et détachée, de toute une génération, celle des hippies et des jeunes blancs-becs de la génération Crumb. Plus que les mots encore, c'est bien l'expressivité du dessin qui séduit et rend hilare, Crumb étant au top dans un sillon bien provoc' et sexuel à souhait. Mal recyclé par le cinéma d'animation, Fritz le has-been, le macho, le dépravé, avait contre toute attente eu droit à un destin commercial glorieux. Crumb, fâché, avait donc décidé de le tuer après en avoir fait un acteur cynique sur le déclin. Un happy-end à la hauteur du personnage : assassiné avec un pic à glace par une autruche. Fritz, enfin redevenu lui-même, avait donc bien le droit de renaître 40 ans plus tard.