L'histoire :
Quatre nouvelles graphiques, quatre récits de vie quotidienne sur l’Amérique d’aujourd’hui. Un point commun : des individus en proie à l’isolement, pris de névroses routinières. L’histoire d’un malaise social aussi, et de l’incapacité des individus à s’adapter aux codes de la vie en société.
Première nouvelle : Un jeune écrivain, récemment publié, reçoit la lettre d’une ancienne camarade de lycée qui souhaite reprendre contact. Il décide de tenter l’aventure. En vain…
Deuxième nouvelle : Un garçon névrosé et complexé tente une mission impossible : séduire la plus belle femme du quartier. Problème : c’est le voisin de palier qui l’a séduite.
Troisième nouvelle : Pour enfin rencontrer l’homme de sa vie, une fille au physique ingrat invente des canulars téléphoniques.
Quatrième nouvelle : Un ado introverti passe ses journées avec son meilleur pote. Tout le monde pense qu’ils sont gays…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Adrian Tomine appartient à la génération des auteurs américains œuvrant dans le « roman graphique ». Remarqué pour l’excellent Loin d’être parfait, Tomine reçut notamment en 1995 le prestigieux Harvey Award du meilleur jeune talent. Blonde Patine fut quant à lui sélectionné à Angoulême en 2005, dans la catégorie du meilleur album. Plus vraiment un espoir de la BD, pas encore vraiment un vétéran, Adrian Tomine est avant tout un conteur de talent. Les thèmes traités dans ses nouvelles rappellent ceux du fabuleux Dan Clowes : ennui, routine, incommunicabilité, désenchantement, solitude existentielle. Un programme déprimant, direz-vous. Et vous aurez raison. Néanmoins, Blonde Platine ne se réduit pas à une complainte post-adolescente nourrie par le ressentiment. Adrian Tomine, loin de tout sentimentalisme et de mièvrerie mal placés, livre au contraire le portrait sensible d’une génération en quête d’identité. A travers des personnages paumés, il préfère poser sur l’Amérique un regard tantôt désabusé, tantôt lucide. De ces histoires ordinaires d’ambitions ratées, se dégage alors un parfum doux-amer à la mélancolie heureuse et romantique. Tomine y dissèque les mœurs légères de ses contemporains pour mieux s’en détacher, sans s’interdire des pauses intimistes jouant la connivence silencieuse. Le style narratif, posé, amplifie alors le ton froid du récit. Un récit néanmoins plein d’émotion distanciée. A l’issue d’une lecture franchement plaisante, il en ressort la radioscopie pertinente d’un mode de vie occidental englué dans le matérialisme vain. Quant à la patte graphique réaliste, toujours aussi sobre et élégante, elle s’adapte parfaitement à ce contexte en noir et blanc. Sollicitant notre empathie, Tomine propose finalement une galerie de personnages à l’âme tourmentée, souvent touchants car imparfaits. Mais au bout de l’errance, la rédemption est toujours possible…Un regard moderne intéressant.