L'histoire :
Seth Fallon vient de terminer son école d'Art. Quatre années à apprendre à faire des portraits. Alors il a le droit à un dernier entretien avec Monsieur Kaiser. Le patron de sa filière lui pose la question qui tue : «Tu vas faire quoi maintenant ? Ça sert à quoi de faire des portraits quand tout le monde a un appareil photo dans sa poche ?». Au passage, Kaiser se fait mousser avec son expo à base de peintures numériques s'animant sur une douzaine d'écrans plats. Le genre de plan qui coûte un max de thunes... Un peu dégoutté, Seth est rejoint par un pote qui le chope au passage en voiture à la sortie de la Fac. Lui, il se prend pas la tête. Il allume son spliff et le fait tourner. Pendant que Seth tousse, il se marre et lui dit de ne pas se faire de la bile. Il a un plan pour se faire des ronds. Récupérer le matos que les gens balancent, dans les bennes et les poubelles, pour le refourguer sur E-bay et se sucrer sur le dos des bobos fans de vintage. Ce qu'il leur faut, c'est un job qui fait pas tourner le ciboulot, comme ça le soir, ils pourront être créatifs...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Joseph Remnant est le dernier dessinateur de la dernière «bd» d'Harvey Pekar, ponte de la Bd indé. Quelques années ont passé et le voici auteur complet, avec un titre évocateur. Il décrit le chemin que Seth Fallon essaye de trouver vers l'âge adulte. On imagine que bon nombre d’éléments du récit sont autobiographiques, tant il brosse avec habileté le portrait de quatre jeunes qui sortent d'une école d'art et se frottent tous à une réalité brutale : bienvenue dans le monde des adultes ! Tu fais comment maintenant pour gagner ta croûte avec ton art ? On suit donc le quotidien de Seth et ses amis, en quête d'un Graal artistique... «réussir». Ou juste pour pouvoir payer le loyer. Et réussir à quel prix, en particulier pour les femmes ? Le récit entremêle le destin des uns et des autres et il livre une vision sans pitié des milieux artistiques. La dope, le fric, la high society et la critique puante, l'hypocrisie, là où des mecs blindés peuvent croiser des crève-la-dalle, les fêtes à n'en plus finir et au milieu, ce jeune type qui essaye de s'en sortir, mais qui semble un peu englué, alors qu'il continue à remplir son carnet à dessins et à faire ses peintures. Joseph Remnant rythme son récit comme un témoignage quotidien. Sa mise en page quasi invariable créé une ambiance intimiste et son trait adopte l'air de la simplicité mais il est hyper expressif et possède du jus. On a même droit à 4 planches dénuées de tout texte et d'une grande beauté. Allez Seth, trace ta route de mec et d'artiste !