L'histoire :
Queens Village, New York, de nos jours. Un couple visite une propriété manifestement laissée à l'abandon. Franchement, le bien immobilier proposé à la vente est lugubre. Le jardin est en friche, les arbres qui n'ont pas été taillés depuis des lustres, ça ne donne pas envie d'aller d'aller plus loin mais l'agent immobilier les invite tout de même à visiter la maison, bien qu'elle soit dans son jus. Un jus qu'on suppose avoir 20 ou 30 ans... Sur le trottoir d'en face, une vieille femme, l'air acariâtre et la clope au bec, observe la scène. C'est Ipo, la voisine. Le couple l'interpelle et lui demande si elle ne vendrait pas sa maison, sait-on jamais. La vieille ne leur répond même pas et leur tourne le dos. L'agent immobilier dit à ses clients qu'il la connaît bien, c'est une amie de ses parents ; elle ne se départira pas de sa maison. Habillement, il ramène le couple vers le business qui justifie sa présence. Il ouvre donc la porte de la maison qu'il est chargé de vendre mais il suffit d'un coup d’œil pour que la visite s'arrête là. Un drôle de détail a attiré l'attention des acheteurs potentiels, qui considèrent que la plaisanterie doit s'arrêter là...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Marjorie Liu et Sana Takeda forment un duo d'autrices qui jouit d'une très forte réputation dans l'industrie des comics. On peut même dire qu'elles ont marqué l'histoire du média, puisque toutes deux ont emporté un Eisner pour leur série précédente, Monstress, avec au passage la première fois qu'une femme était primée en tant que scénariste. Alors... sans doute est-ce un inconvénient, mais on attend beaucoup d'auteurs ayant décroché cette récompense et à la lecture de ce premier volume, on ne peut pas dire qu'on soit déçus, mais on n'est loin d'être tombés de notre chaise. Tout commence pourtant de manière plaisante, à la façon d'un roman graphique intimiste. Les personnages s'installent doucement et l'accent est vraiment mis sur les liens intrafamiliaux. Des enfants bosseurs, des parents bien perchés, dont une mère froide comme un glaçon et les incompréhensions qui marquent la cellule familiale. Ainsi, la psychologie des personnages, avec des flashbacks récurrents qui mettent en scène les parents, vient animer, sur un rythme lent, quasiment la moitié de ce premier volume. Et puis c'est la déflagration : en quelques pages, on bascule brutalement dans le registre de l'horreur. On ne vous en dira pas plus pour ne pas tout révéler, mais si le switch est réussi, l'intrigue qui en découle, en revanche, ne parvient pas à nous scotcher. Pour le moment, les thèmes fantastico-gore sont archi classiques. Reste à savoir comment les autrices y donneront suite. Côté dessin, Sana Takeda abandonne l'esthétique vraiment chiadée de Monstress au profit d'un dessin plus « expressionniste », où les personnages sont esquissés et les couleurs évoquent l’aquarelle. Les débuts de Night Eaters s'avèrent donc assez déroutants et pour l'heure, on ne saurait vous dire si c'est une franche réussite...