L'histoire :
Deux frères nommés Sherwood et Orson s'amusent, comme beaucoup d'enfants, à explorer leur environnement. Curieux, ils entrent dans une caverne, ne sachant ce qu'ils y trouveront. Hélas, c'est une créature malfaisante qui réside ici et, si les frères parviennent à l'occire, le monstre laisse à Sherwood une curieuse amulette ainsi qu'un étrange don de vision. Des années plus tard, ailleurs, le monde est en ruine. Majoritairement peuplé d'enfants, ce monde subit le joug des Shadow Men, des créatures immondes qui emplissent les enfants de désespoir rien qu'en les touchant et se servent d'eux pour se multiplier. Au milieu des enfants, désormais répartis en bandes rivales, un groupe sort du lot : les Wrenchies. Ce nom provient d'un comics trouvé dans les ruines de l'ancien monde. Les Wrenchies vont découvrir qu'il existe un espoir, un savant qui saurait comment se débarrasser des Shadow Men. Pendant ce temps, dans notre monde, un jeune garçon un peu gauche nommé Hollis, tente de comprendre sa place dans le monde. Écartelé entre son éducation catholique et son amour des comics, il commence à avoir de drôles de visions. Celles-ci seraient-elles liées à son voisin, un jeune homme du nom de Sherwood ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
The Wrenchies risque d'en surprendre plus d'un. Avec ses illustrations (très belles) rappelant celles de certains contes et légendes et avec sa narration complexe, fragmentée et passant rapidement d'une ligne temporelle ou d'un univers parallèle à un autre, ce comics est riche en projections, références et autres métaphores. Difficile de ne pas faire le parallèle avec un Grant Morrison qui considère souvent (systématiquement ?) le comics comme une sorte de clé magique permettant de matérialiser la volonté de son créateur. On peut aussi y voir l'affection de l'écossais pour les univers parallèles et les nombreuses possibilités (le parallèle entre les nombreux univers et les faisceaux de possibilités présentés un un jeune enfant sont évidents). Mais Farel Dalrymple reste plus centré que Morrison en cela qu'il fait de son comics une œuvre cathartique visant à exprimer son propre mal-être en tant que créateur, ses tourments et sa nostalgie d'une certaine innocence. Au risque parfois de se perdre : les métaphores son parfois trop appuyées, au détriment de la narration, et les thèmes abordés semblent clairement avoir été répartis à mesure de l'écriture, gênant l'unité de l'ensemble en le fragmentant. N'y allons pas par quatre chemins : The Wrenchies est un roman graphique conséquent, torturé, complexe et (prenons une pose face à la mer en nous préparons à une petite masturbation vocabulaire), méta-fictionnelle. Farel Dalrymple conte ici ses propres tourments, en tant que jeune garçon rempli d'espoir, rêvant d'aventures et de sauver le monde (notamment via son art) avant d'être « touché » par les Shadow Men (les adultes) qui vont le rendre fou. Pour réussir à sauver son monde, Dalrymple aura besoin d'un avatar : son lecteur (le jeune Hollis), qu'il va projeter dans son univers. Voilà, sachant cela, vous serez déjà bien armé pour appréhender The Wrenchies, un des romans graphiques les plus riches et tordus sorti chez nous depuis un moment. Est-ce que Hollis va réussir à sauver le monde des enfants ? Pour le savoir, il faudra lire ce comics, prendre sa place et vous armer de patience !