L'histoire :
Au Gutter, on peut retrouver aussi bien les super-héros établis comme Batman, Superman, Iron Man ou Captain America mais aussi les héros de la BD Franco-Belge ou les héros de l'indé. Et tout ce joyeux monde ne cohabite pas toujours dans la joie et l’allégresse : vannes pourries, rancœurs et autres remarques désobligeantes ressortent après quelques pintes. On comprend ainsi que Spidey est la risée des super-héros à cause de sa poisse en amour ou bien que les super-vilains en goguette vivent assez mal leurs passages à tabac réguliers et leurs rôles limités. Le tout dans une ambiance sombre, crasseuse et surtout, surtout, bien alcoolisée.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le domaine de la parodie, en particulier d'univers aussi codifiés et relativement « propets » que celui des super-héros est en général un exercice plutôt casse-gueule. Avec The Gutter, Cyrill Durr se penche sur les « entre-deux », ces petits moments de calme entre deux tempêtes. Imaginant que vilains comme héros se retrouveraient autour d'un (plusieurs) verre(s), l'auteur s'imagine ce qui pourrait se passer et surtout se dire. Qu'on se rassure, les créateurs sont connaisseurs en la matière et les fans trouveront de multiples références à de grands évènements présents ou passés (Gwen Stacy, Civil War ou même à des auteurs comme Alan Moore). Graphiquement, le look craspec de l'infâme rade est parfaitement restitué grâce à un joli travail sur les couleurs, expliqué d'ailleurs dans une intéressante partie éditoriale située en fin d'ouvrage où l'auteur comme les artistes expliquent et montrent leur travail. Pour l'écriture, l'exercice tourne parfois court et les longues diatribes des personnages semblent parfois tourner autour du pot et multiplier les références, une limitation due au fait qu'ici (contrairement à d'autres parodies comme les Sticky Pants, l'humour est censé résider plus dans l'écriture que dans le visuel et que l'ensemble de l'action se limite au bar éponyme. Assez drôle, au final, The Gutter remplit son contrat, même si on se prend à imaginer ce que cette parodie gonflée aurait pu donner en se débarrassant de ses limites géographiques et en condensant ses blagues (en une page, un strip voir une image).