L'histoire :
Héraclès est né presque en même temps que son frère Eurysthée. Le sort a décrété que le premier des deux à naître commanderait l'autre. Eurysthée naquit en premier : il deviendrait un tyran avide de conquête et de pouvoir. Héraclès, lui, un futur héros. A neuf ans, il expérimente déjà les lois de la nature : Eurysthée veut tuer un petit agneau pour le manger tandis qu'Héraclès cherche à le sauver. Face à la popularité croissante du héros, Héra, la déesse des déesses, informe Eurysthée qu'ils vont lui faire mordre la poussière, en lui soumettant une série de douze travaux impossibles à réaliser. Mais c'était sans compter sur les ressources extraordinaires d'Héraclès, un puits de muscle, jeune, beau, et très adroit. Première épreuve : une bête invincible terrasse Némée et son armée. C'est alors qu'Eurysthée fait appel à Héraclès pour sauver la ville du fléau. Le héraut de Néméé n'en croit pas ses yeux : un enfant pour défendre ses terres ! Alors qu'il faudrait une armée ! Au terme d'un combat acharné et sanglant, c'est pourtant bien le monstre qui finira scalpé...Douze exploits à réaliser, parmi lesquels le lion de Némée, l'hydre de Lerne, la biche de Cérynie, le sanglier d'Erymanthe, les oiseaux du lac Stymphale, des adversaires plus avides de mort que jamais, comme autant d'épreuves sur le chemin de la connaissance de soi. Face à eux, un héros en Harley, cool et fan de son MP3, à l'ombre d'une Olympe high-tech...Un héros en apparence indestructible...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Méconnu chez nous, l'auteur espagnol David Rubin s'offre ici la relecture décalée d'une célèbre chronique mythologique : les travaux, exploits et aventures du fameux Hercule. Sans dénaturer l'essence du mythe et toujours fidèles aux évènements, l'auteur interprète les actions du héros, à la fois Dieu déchu et homme divinisé, en le plongeant évidemment dans des combats au souffle épique, mais en lui ajoutant une dimension psychologique nouvelle, révélant une puissance aux pieds d'argile. Il égratigne ainsi la figure du héros gonflé d'hubris, doté d'une popularité démesurée, singe le culte de la célébrité et de la performance pour en révéler toute la vanité, tout en rendant un vibrant et sincère hommage aux récits de super-héros, par ses nombreux clins d’œil ou références. Entre l'anachronisme calculé de certaines scènes, le croisement des mythologies (héros ou super-héros) et le mimétisme stéréotypé à valeur d'authenticité, associé à de subtiles mises en abîmes, Rubin se livre à une joyeuse entreprise de destruction créatrice, manière pour lui de revisiter la place que chacun, aujourd'hui, est prêt à accorder au héros. Il en triture donc la symbolique en un joyeux mélange, entre moments d'énergie pure, humour léger et émotion, à la croisée du récit épique, du blockbuster à gros effets et...du jeu-vidéo beat them up. Quant au dessin cartoony et survitaminé teinté de couleurs exaltées, sans doute le gros point fort du livre, il joue à merveille de l'héroïsme survolté pour mieux révéler les failles mentales du personnage, finalement humain, bien trop humain. Beaucoup de pages révèlent d'ailleurs une parfaite technique graphique, très agréable à l'oeil. David Rubin s'inscrit donc dans une tradition antique parfaitement rendue, mais modernisée, "futurisée", acceptable et compréhensible. Outre le divertissement qu'il procure, Le Héros ressemble bien à une variation maline sur la figure du héros et sa condition : illusoire objet de fascination ou puissant ressort d'identification ? Peut-être un défaut dans ce livre : la répétition de combats homériques identiques, parfois lassante. Allez, on chipote un peu, car le rythme reste très soutenu malgré les 250 pages. Symptomatique d'un monde qui peine à trouver ses figures tutélaires, Le Héros livre donc sa version du héros moderne : un peu désabusée mais jouissive. Car des héros, des vrais, nos sociétés en manquent cruellement, à hauteur du désenchantement ambiant. Possible dès lors que celui de Rubin comble un peu les vides. Une belle trouvaille, aussi inventive que délirante, bourrée d'action, et dont le héraut n'est autre que Rackham...