Le 28 août 2017, Jack Kirby aurait eu 100 ans. Alors qu'il nous a quitté le 6 février 1994, celui que l'on surnomme encore et toujours le King of Comics voit les lumières se tourner légitimement vers lui. Créateur ou cocréateur d'une quantité incroyable de personnages populaires comme Captain America, Thor, les X-Men, les New Gods ou les Avengers, il a influencé une quantité énorme d'artistes et pas forcément qu'aux U.S.A.. Alors que des ouvrages sur Jack Kirby existent, Mickaël Géreaume, rédacteur en chef de la partie comics de PlaneteBD.com, et Alain Delaplace, chroniqueur-traducteur sur le même site, se sont associés pour concevoir un ouvrage différent et réunissant plus de 200 artistes et auteurs venant aussi bien des mondes de la bande dessinée franco-belge et du comics, mais aussi d'autres sphères. En plus, les bénéfices sont reversés à une association américaine aidant les artistes dans le besoin. Kirby&Me est leur premier livre et forcément, nous les avons passé sur le grill de nos questions-maisons.
interview Comics
Mickaël Géreaume & Alain Delaplace
Pouvez-vous commencer par vous présenter ?
Mickaël Géreaume : Hey, pour faire court, je suis sur PlaneteBD depuis plus d'une dizaine d'années. Je rédige souvent des chroniques et m'occupe plus particulièrement de la section comics. J'essaie d'être le plus actif possible et d'offrir régulièrement des interviews aux lecteurs du site. J'ai trouvé le temps en parallèle de co-créer le projet Kirby&Me qui, je l'espère, rend un bel hommage à Jack Kirby et comblera les fans.
Alain Delaplace : Salut les kids, j'ai rejoint le site il y a un moment maintenant. Je chronique, je fais des traductions et comme je n'ai pas trop le temps, je me suis lancé dans une aventure éditoriale assez dingue et exténuante.
Comment, d’ailleurs, vous êtes-vous connus, tous… tous les deux ?
Mickaël Géreaume : Je ne sais plus si c’était à un concert d’Henri Des-Métal ou à une partouze… Plus sérieusement, je l’ai croisé la première fois à Radio Béton où nous nous étions « associés » pour interviewer Jul qui passait dans une librairie de Tours. Un bon moment. Puis une seconde fois à la dédicace de Terreur Graphique et Goupil Acnéique, deux auteurs à l’humour avant-gardiste et subtil. On a échangé plusieurs fois ensuite et un été, j’ai passé un appel pour avoir de nouveaux chroniqueurs sur PlaneteBD, des personnes avisées s’y connaissant en comics. Alain a répondu présent. Deux semaines plus tard, je lui ai demandé s’il voulait rejoindre l’émission Komic Strips, avant, quelques semaines après, de lancer notre version « comics » de l’émission. Derrière, il est devenu ma voix anglaise et a traduit un paquet d’interview pour le site.
Alain Delaplace : Comme quoi, on s’ennuie un jour, on répond oui à un appel et on se retrouve embarqué dans des trucs pas possibles. Mickaël, c’est la seule personne qui peut me rendre chèvre et me mettre hors de moi en deux temps, trois mouvements. Mais c’est aussi la seule personne qui soit aussi impatiente que moi et qui va faire les choses dans les temps sans que j’aie besoin de la relancer. Et ça, on s’en est aussi rendu compte avec le temps, c’est aussi rare qu’appréciable.
Qu’est-ce qui vous est passé par la tête, à Alain et toi, pour sortir un bouquin pareil ?
Alain Delaplace : Quand j’ai eu la bonne idée de porter un T-shirt Hydra à Paris Manga, il y a deux ans. Après, c’est venu tout seul. Plus sérieusement, on était à Paris Manga, fin 2015, quand on a rencontré Alain Mauricet. Et il portait comme moi un t-shirt Hydra et aussi le même prénom. On a commencé à discuter et il venait de dessiner une caricature de Jack Kirby, ma foi fort sympathique. On parle de Jack Kirby et, sur le chemin du retour, le sujet revient. Je me suis dit que ce serait cool d’avoir une galerie d’hommages dans le même genre. Mickaël surenchérit avec « Oui, mais il faudrait les réunir dans un livre, pour que ce soit vraiment intéressant », là-dessus on se marre en disant qu’il faudrait être des malades pour se lancer dans un truc pareil. Une journée passe, Mickaël me rappelle et dit « Banco, on le fait ! ». Ivre, je dis oui.
Mickaël Géreaume : Il y a des milliers de choses qui me passent par la tête et si on m’écoutait, je suis sûr que PlaneteBD aurait lancé sa première expédition spatiale il y a 5 ans au moins. Lol J’ai une fâcheuse tendance à vouloir pousser chaque chose à son maximum et comme je dors peu, je cherche des solutions ou des façons de développer les choses que j’aime. Lors de cette discussion avec Alain, l’idée du livre me semblait une évidence. On pouvait rendre un peu à celui qui nous a tant fait rêver plus jeune et tenter une aventure nouvelle. Comme Alain ne m’a pas dit « non », on l’a fait.
Quels ont été vos rôles respectifs, et c'est qui le plus fort de vous deux ? Qui était l'esclave de l'autre, en vrai ?
Mickaël Géreaume : De manière générale, on a pris les décisions importantes à deux. C'est un projet commun. J'ai pris en main le démarchage des auteurs en grande partie, le suivi de ceux-ci. Je me suis occupé de la communication via Facebook. Je me suis occupé du chemin de fer du livre, des relations avec l'imprimeur, la banque etc. On s'est réparti les tâches selon nos sensibilités et je pense que c'est ça qui a permis au livre d'arriver à l'heure et, j'espère, de plaire aux lecteurs.
Alain Delaplace : On est assez différents et on ne prête pas attention aux mêmes choses. Au début, on commençait à se dire « ça, c’est pas important, vaudrait mieux s’occuper de ce truc-là » et puis, rapidement, on s’est rendu compte qu’il valait mieux que chacun s’attelle à sa marotte et on s’est bien complétés. Ma partie, c’est tout ce qui touche aux textes, à la culture anglo-saxonne et à l’administratif, aussi. J’adore les musiques d’attente téléphonique, c’est ma grande passion.
Jack Kirby, qui c’est au juste ?
Mickaël Géreaume : Qui est Hergé ? Qui est Tezuka ? Jack Kirby est considéré comme le King of Comics, celui qui a imposé un style, une narration et des thématiques dans l'industrie de la bande dessinée populaire américaine. Il est le créateur ou cocréateur de centaines de personnages majeurs. Pour expliciter l’importance de Jack Kirby auprès d'un amateur de BD franco-belge, c’est comme si un seul homme avait créé Astérix, Tintin, Valérian et Gaston. Ce fut un artiste qui a touché à tous les genres, du western au super-héros, du récit de guerre à la romance, de l’horreur à la science-fiction. Il a également œuvré dans d’autres registres artistiques comme l’animation ou le design de costumes. C’était un homme généreux, à la capacité de travail impressionnante et qui reste plus de vingt après sa disparition comme LE génie des comics. Jack Kirby a aussi été l’un des pionniers aux U.S.A. dans la quête des droits des auteurs à la création.
Alain Delaplace : Un sacré monsieur. Outre toutes ses contributions artistiques – qui sont allées au-delà des pages des comics –, c’était quelqu’un d’intègre qui se battait contre les extrêmes. Il a laissé une forte impression sur toutes les personnes qu’il a côtoyées ou qui lui ont succédé, comme on a pu s’en rendre compte en réalisant l’ouvrage.
Pourquoi Kirby et pas un autre ?
Mickaël Géreaume : Dans le 9ème art, il y a des références absolues. Sur PlaneteBD, j’essaie toujours de démocratiser la section comics dont je m’occupe, d’être le plus exhaustif possible au niveau des sorties (si vous voulez nous rejoindre et me délester un peu, votre candidature sera étudiée avec le plus grand soin), apporter des interviews inédites. Alors que je retrouvais une interview de Jack Kirby sur le net, j’en faisais part à Alain et il a proposé d’en traduire des extraits pour la page Facebook. Je lui ai dit que l’on pourrait peut-être avoir les droits pour une traduction française pour le site. Ni une ni deux, les démarches effectuées et un travail titanesque d’Alain plus tard à la traduction, moi à l’encodage et avec le soutien de Jean Depelley pour expliciter certains points, l’interview de Jack Kirby, la dernière qu’il donna, fut disponible sur le site. Alors qu’Alain était encore en plein dans la traduction, nous avions commencé à imaginer ce que l’on pourrait faire de plus. Et comme nous savions que le 28 août 2017 serait le centenaire de la naissance de Jack Kirby, nous avions l’opportunité de le célébrer à notre manière.
Alain Delaplace : C’est vrai qu’on aurait pu faire quelque chose de semblable pour le centenaire de Will Eisner, cette année. Mais Kirby a quelque chose de particulier, de populaire au sens noble du terme. On a tous fait la connaissance des comics par le biais des personnages de Kirby, plus que par ceux d’Eisner – sans pour autant dénigrer l’importance d’Eisner. L’occasion était là, il fallait faire un choix et ce sont les circonstances et notre propre passif qui l’ont décidé pour nous.
A-t-il été difficile de convaincre des auteurs de fournir des dessins gratuits en hommage au King of comics ?
Mickaël Géreaume : Je crois sincèrement que ce qui a fait force de persuasion a été le sérieux que l’on a su mettre dans l’élaboration, la description de chacune des étapes du projet. Alain et moi sommes des maniaques, moi de l’organisation et lui des détails. On a réfléchi à chaque étape, chaque moment pouvant bloquer. Je pense aussi que la sincérité et l’honnêteté de notre démarche ont été les plus indéniables.
Alain Delaplace : Le bouche-à-oreille et avoir de plus en plus de noms a facilité l’entreprise. Au début, heureusement, on a pu compter sur des auteurs proches, que l’on connaissait, pour s’établir un certain crédit. Le reste a fait boule-de-neige. Mais clairement, oui, on ne pouvait pas se lancer comme ça et aller directement frapper à la porte de géants des comics qui ne nous connaissaient ni d’Eve, ni d’Adam.
Avez-vous reçu des encouragements de grands noms de la BD ?
Mickaël Géreaume : Nous avons eu de précieux conseils de professionnels lors de discussions, des personnes qualifiées que nous avons le plaisir de connaître de par nos années de passion et de dévouement au sein de PlaneteBD. Evidemment que certains nous encourageaient et y croyaient même fortement. Cela nous a fait plaisir, bien sûr, et nous rajoutait une responsabilité supplémentaire et bienvenue. On ne voulait pas décevoir. On a essayé de solliciter le maximum de grands noms, mais certains ne nous répondaient pas, d'autres ne se sentaient pas à l’aise sur Kirby ou ses personnages, etc. On a essayé d’avoir une réelle diversité dans les artistes, certains venant du comics, d’autres de la BD, du manga ou d’ailleurs. Nous avons forcément souffert du fait qu’il s’agisse de notre premier livre et que beaucoup ne savaient pas ce que l’on allait bien pouvoir faire. Aujourd’hui, Kirby&Me existe et beaucoup ont pu voir l’amour que l’on a mis dans notre travail et surtout la qualité que l’on a essayé d’avoir en termes d’ouvrage.
Alain Delaplace : Pas mal de curiosité, aussi. Je pense que beaucoup avaient hâte de voir le résultat et fondaient leurs espoirs sur nous. J’espère qu’on a répondu à leurs attentes, en tous cas c’est l’impression que les retours nous donnent.
L’ouvrage a des dimensions, une épaisseur et une qualité d’édition hors normes… Vous aviez prévu ces supers-qualités à l’avance ?
Mickaël Géreaume : On est bien accueilli ici lol. D’emblée et alors qu’on n’arrêtait pas de le crier sur tous les toits lors de la campagne de financement participatif, on voulait un beau livre à la taille inédite, presque 300 pages, un papier épais, etc. Je crois que personne ne croyait qu’on le ferait ainsi ! Les dimensions devaient être importantes pour que les illustrations en mettent plein la vue. On a choisi de partir avec un imprimeur français pour être sûr du produit fini. Donc oui, c’était prévu ! Par contre, ce qui nous a fait plaisir, c’est d’avoir les retours de professionnels, de libraires ou de lecteurs qui sont tous séduits par l’objet.
Alain Delaplace : On parle de Kirby, nom de nom ! On n’allait pas faire un Picsou Géant en papier recyclé !
À quoi correspondent les titres étranges du chapitrage ?
Mickaël Géreaume : On a imaginé plein de possibilités, des choses simples, évidentes, obscures etc. On a mis beaucoup de temps à réfléchir à la répartition des hommages et à l’homogénéité de l’ouvrage. Certes, j’ai du revoir 50 fois le chemin de fer du livre, mais c’était aussi prise que tête que jouissif. Lorsque les chapitres furent bien ciblés, on s’est dit que proposer un simple mot, compréhensible aussi bien en français qu’en anglais serait logique. Restait à trouver lesdits mots. Mais ça, je vais laisser Alain vous l’expliciter.
Alain Delaplace : Disons qu’il a fallu rapidement trouver comment composer l’ouvrage, lui donner une ligne directrice. J’ai eu, un soir, une idée que j’ai trouvé un peu idiote. Mais ça m’a trotté dans la tête et j’en ai fait part à Mickaël. On a réparti ce qu’on avait suivant cette idée et ça collait parfaitement. On a par la suite retravaillé le concept – remarquez bien que je ne le dévoile pas d’emblée – et on a ainsi trouvé les chapitres qui correspondent, en fait (attention) au ressenti et à l’impression des différentes illustrations les composant. Gimlé, c’est le renouveau, la renaissance (cherchez un peu !) tandis que Samhain représente l’équinoxe, une certaine turpitude.
Pensiez-vous que l’ouvrage aurait autant de succès ?
Mickaël Géreaume : En passant par le financement participatif, rien n’est certain. Le livre étant en français et en anglais et le thème du livre un auteur américain, nous aurions dû passer par un site du type Kickstarter, chose que l’on avait prévu au départ. Cependant, le caractère caritatif du projet n’allait pas de pair avec leurs conditions. Ulule, une plateforme française, proposait de meilleurs atouts, moins international et donc moins de préventes, mais un sérieux indéniable dans nos échanges avec eux et le suivi impeccable. À force de persuasion et avec l’aide de tous les Ululers, nous avons pu tirer le livre à 1300 exemplaires, autant d’albums en plus pour augmenter les bénéfices reversés à l’association Hero initiative qui vient en aide aux artistes sans ressources. On nous a dit que l’on voyait trop grand ou pas assez, mais le tirage approche progressivement et très rapidement des 1000 exemplaires écoulés. Vu que l’on propose un livre entièrement original, avec une structure éditoriale nouvelle, un système de distribution embryonnaire, je pense que c’est plutôt pas mal, oui. Je rappelle juste en parallèle qu’Alain et moi travaillons tous les deux dans des métiers chronophages, avons chacun une vie de famille à gérer, PlaneteBD à remplir d’articles, etc.
Alain Delaplace : Vu notre implication, l’échec n’était pas une option. C’est cliché, mais c’est vrai. Les rares moments de doute, on les a très mal vécus. À aucun moment on s’est dit qu’on était les meilleurs, que ça allait être super, mais on a tout mis dans ce livre pour essayer d’en faire un bel hommage. L’aspect caritatif de l’entreprise, le lien étroit avec Kirby et son œuvre, tout ça nous a mis la pression et on a toujours, non pas pensé, mais espéré qu’on arriverait à un super résultat.
Est-il prévu un retirage ?
Mickaël Géreaume : On s’est longtemps posé la question avec Alain et je crois que nous sommes arrivés à la conclusion qu’il n’y aurait pas de retirage. C’est sûr à 99% dirons-nous.
Alain Delaplace : 99.9%
Mickaël Géreaume : Il faut bien une fin à tout. On a tenu parole en menant ce projet jusqu'au bout. À nous la suite.
Est-il recommandé de faire sa muscu en tenant un Kirby&Me dans chaque main ?
Mickaël Géreaume : Évidemment, c’est même pour ça qu’on l'a fait.
Alain Delaplace : Étant donné les dimensions et le poids, on peut aussi s’en servir comme planche à découper, comme gilet pare-balles ou encore comme arme contondante.
Sur le plan graphique / artistique, quelles sont vos déceptions et a contrario, vos meilleures surprises ?
Mickaël Géreaume : Moins sympa cette question, vous voulez qu’on se fâche avec qui ? lol En fait, je dirai que la déception vient surtout des artistes qui n’ont pas donné suite, faute de temps alors qu’ils étaient motivés et nous l’ont dit à plusieurs reprises. Par exemple, avoir un retour de Frank Miller nous a fait énormément plaisir et on y a cru jusqu’au bout. Malheureusement… Concernant les surprises, je dirais qu’avoir deux illustrations de Bill Sienkiewicz pour le livre, ça tient du miracle. Qu’avoir eu la confiance de Stefano Gaudiano et Moritat qui ont voulu faire 5 pages de BD dans le livre, c’est hallucinant. Qu’Enrico Marini ait pris le temps de croquer Captain America, c’est génial. Que Laurent Lefeuvre ait voulu se charger de la couverture en plus de son superbe Ben Grimm en penseur, c’est un coup de bol monstrueux. Le destin fait parfois bien les choses. Je n’en cite que quelques unes, mais pour moi, chaque hommage a été une surprise, car nous avons pu voir que tous ont pris le sujet avec sérieux et passion. Il y a plus de 200 surprises dans le livre.
Alain Delaplace : On a forcément été déçus quand on n’a pas pu avoir certains artistes. Personnellement, ma baleine blanche, c’était Bill Sienkiewicz. Quand on a reçu non pas son mais SES hommages, je me suis déshabillé et j’ai parcouru mon quartier en hurlant, couvert de miel. Mes voisins ne m’adressent plus la parole mais on a eu deux dessins de Bill Sienkiewicz, bon sang ! Je citerai aussi Motte, un street artist dont l’hommage a épaté beaucoup de gens, dont moi.
Pourquoi certains auteurs sont-ils relégués à la fin, avec leur dessin en petit : sont-ils punis ? arrivés au dernier moment ? N'avaient-ils pas écrit de texte ?
Mickaël Géreaume : Le livre devait à l'origine faire entre 250 et 300 pages. Il en fait 320. Nous avons essayé de privilégier une composition et un découpage efficace et cohérent par rapport aux thématiques de nos différentes parties. Certains hommages sont arrivés trop tard, d'autres avaient des formats atypiques et nous avons dû faire des choix. Parfois à contre-cœur. C'est ça éditer.
Alain Delaplace : : Je ferai remarquer que, d’une part, il y a des artistes « en grand » qui n’ont pas écrit de texte non plus et aussi que, parmi les « petits », il y a de belles participations, des grands noms, des hommages qui nous ont tenu à cœur, etc. Mais comme le fait remarquer Mickaël, tout s’est joué à des détails techniques et en aucun cas à des préférences personnelles. On s’est mis en retrait par rapport aux participants et imposer nos goûts personnels, ç’eut été tricher. Et la dernière chose dont moi, en tout cas, j’ai envie, c’est de me réveiller en pleine nuit avec le fantôme de Jack dans un coin de la chambre, mâchouillant son cigare et me jetant un regard réprobateur. Brrr.
Plus globalement, qu’est-ce qui a été le plus difficile dans ce projet ?
Mickaël Géreaume : À chaque étape ses difficultés. Je crois surtout que la principale difficulté a été que nous ne soyons que deux pour gérer plus de 200 participants, 500 Ululers, etc. Il faut bien voir que nous avons géré les pages de réseaux sociaux, les campagnes presse, le recrutement des participants, la création du livre, l’organisation de nos venues et aussi les envois des ouvrages à deux seulement. On a débuté par un projet archi compliqué et je trouve qu’on ne s’en est pas trop mal débrouillé. Si vous rajoutez à ça du stress, des crises de panique et des allers-retours chacun à l’hôpital, je pense que nous pouvons dire que nous avons survécu. Lol
Alain Delaplace : Le perfectionnisme. C’est débile mais on s’est beaucoup pris le chou sur des détails, au millimètre près et aujourd’hui encore, la moindre coquille décelée est un crève-coeur. Les délais qu’on s’est imposés, aussi. On n’a pas eu un jour de retard sur un planning établi presque deux en à l’avance mais ça nous a mis une pression de malade sur la dernière ligne droite.
Y-aura-t-il d'autres projets Komics Initiative, comme un autre ouvrage dédié à Hergé ou Franquin, kings of la bédé franco-belge ?
Mickaël Géreaume : Franchement, s’il y aura un jour un autre « …&Me », peut-être. Mais quant à savoir sur qui ou sur quoi… Nous ne fermons la porte à aucun grand nom, qu’il vienne du comics, de la BD ou du manga. Mais vu la somme de travail que cela requiert, nous travaillons dans un premier temps sur d’autres optiques et faisant intervenir moins d’artistes. Il y a plein de choses à imaginer et qui, j’en suis certain, pourraient faire plaisir aux lecteurs. On a des envies, des idées, reste à voir comment le faire.
Alain Delaplace : Aucune idée, je n’ai pas envie de devenir une turbine à hommages, au risque de dévaloriser ceux/celui déjà fait(s). J’ai surtout hâte de faire un break.
Mickaël Géreaume : Et d'en acheter un, de break.
Si vous aviez le pouvoir cosmique d’entrer dans le crâne d’un auteur qui ne s’appelle pas Jack Kirby (pour capter son génie, ou ses méthodes…), chez qui iriez-vous faire un tour et pour espérer y trouver quoi ?
Mickaël Géreaume : Pour en énerver certains, je pourrais dire Stan Lee, j'y trouverais certaines vérités manquantes autour de sa relation avec Jack Kirby et je comprendrais enfin comment il a pu lancer autant de séries et superviser autant de types talentueux et géniaux. Et je comprendrais aussi comment avoir l'air cool avec une moustache.
Alain Delaplace : Warren Ellis. J’irais trouver ce qui fait de lui l’auteur qu’il est, j’assimilerais tout ça, puis je me débarrasserais du corps avant de quitter mon job actuel et de devenir auteur moi-même. Quoi ? On me pose une question, je réponds franchement.
Merci à tous les deux !