L'histoire :
- Un commis voyageur se présente chez un particulier. Bien qu’observé par le judas, l’homme se heurte à une porte fermée et silencieuse. Il décide donc de repasser plus tard mais à peine a-t-il posé un pied dans la rue qu’une camionnette le renverse. En sortent alors un sous-directeur flanqué de son collègue qui vont essayer d’arranger la situation...
- Au lycée, un élève a pris l’habitude d’imiter les tics d’un handicapé. Seulement, son entourage commence à s’y mettre : c’est ainsi que naît la maladie X...
- Il peut arriver à un mangaka de rejeter des planches. Par contre, le fantôme de ces dernières peut décider de se venger...
- Nana est retrouvée après avoir disparu deux ans. Seulement, celui qui l’avait séquestrée l’a un peu trop bien dressée au goût de son père...
...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Mangaka caméléon, Usamaru Furuya change de style et de ton à chaque titre, aussi ne sait-on jamais à quoi s’attendre. Ici, chaque planche est découpée en 4 cases dans lesquelles l’auteur nous propose des petites histoires, certaines se déroulant tout de même sur deux pages et d’autres étant des petits épisodes récurrents. Les nouvelles sont soit des intrigues dérangeantes à la limite du déviant (inceste, séquestration, mutilation...), soit des moments d’humour décalé (notamment dans des détournements de peintures religieuses). Ceux qui ne connaissent pas l’auteur ou n’aiment pas ce genre de récit décalé et étrange seront complètements perdus mais les autres sauront apprécier le travail de l’auteur (tout en se demandant tout de même si ce dernier n’a pas consommé des substances illicites avant de pondre ses histoires). Ainsi, on peut suivre des policiers qui enquêtent sur des meurtres atroces commis par un ourson serial killer, un lycéen qui contamine son entourage avec un tic emprunté à un handicapé, un homme qui veut être payé en échange de quelques gouttes de son sang salvateur, une famille qui se complaît dans la mutilation... Les intrigues tournant autour de la sexualité sont souvent glauques et pas toujours bien intéressantes, mais les autres sont assez remarquables : en quatre cases, on peut alors trembler (de rire ou de peur) et saisir tout le vécu des personnages, les voyages étant toujours prenants et surprenants. Déroutant de prime abord, ce recueil parvient toutefois à nous immerger instantanément dans les univers proposés et il est tout simplement impossible de rester insensible devant le rendu. On notera par ailleurs que l’auteur se met lui-même parfois en scène et on remarque également des personnages célèbres (l’inspecteur Colombo, Doraemon et Golgo13 pour n’en citer que trois) ainsi que les saints hommes Jésus et Bouddha. Il est vrai que certaines histoires peuvent tout de même laisser perplexe quant à la santé mentale de l’auteur mais on ne peut en aucun cas ignorer son talent de narrateur. Quant aux graphismes, le mangaka explore un peu tous les horizons et chaque histoire (donc presque chaque planche) possède son propre style visuel ! Tantôt réaliste, tantôt surréaliste, tantôt grossier, tantôt parodique d’un genre donné (shôjo par exemple), le trait varie donc en fonction des récits et il en va de même pour les cadrages qui redoublent parfois d’imagination (avec des vues à travers un judas ou une caméra de surveillance par exemple), et il est à noter que quelques-unes des histoires se payent même le luxe d’être en couleurs. De plus, certaines illustrations pourraient trouver leur place dans des musées tant on a l’impression de voir des œuvres d’art, il y a également des pages qui sont annotées par des personnages et certains protagonistes qui s’amusent avec le découpage, quand il n’y a pas tout simplement des planches dans les planches ! Les perspectives sont également mises à l’épreuve, les personnages s’en plaignant même parfois ! L’exercice de style est aussi intéressant que parfaitement réussi et le plaisir du mangaka se fait ressentir sans peine. Bien qu’à ne pas mettre entre toutes les mains, ce recueil est tout de même à découvrir pour les amateurs de titres franchement décalés : vous êtes prévenus !
