L'histoire :
Alors qu’il est en train de mourir sur la chaussée, Naruo se remémore sa situation il y a un an et demi. A l’époque, lui et les membres du groupe se préparent pour le concert de fin d’études et, ne voulant pas rentrer dans une quelconque entreprise pour y faire un travail de bureau qui ne les intéresse pas, ces derniers s’orientent donc plutôt vers une carrière faite de petits boulots. Meiko, elle, a obtenu un poste d’Office Lady et va donc rentrer dans un moule que Naruo refuse d’envisager pour lui-même, celui qui garantit un futur sans surprise et sans saveur. Il lui fait d’ailleurs part de ses doutes mais la demoiselle n’apprécie pas vraiment la remarque. Au moment du concert, un des membres du groupe de tête d’affiche leur annonce qu’il va être intégré dans une grande entreprise et, lorsque Naruo et ses amis lui annoncent qu’ils vont devenir freeters, ce dernier les dénigre en déclarant que c’est une façon de prolonger leur adolescence. A la fin du concert, Naruo craque alors et déclame au public ce qu’il pense vraiment de ce « passage à l’âge adulte » : si c’est pour devenir une machine en échange d’un bonheur tiède, il préfère encore tenter sa chance sur un chemin, certes beaucoup plus dur, plus incertain et plus long, mais qu’il tracera lui-même, quitte à changer d’avis plus tard ou à se planter. Revoyant Meiko juste après, il lui déclare alors que, malgré tous ses doutes, il sait au moins une chose : qu’il l’aime. Devant ce constat assez simple, il décide ensuite qu’il écrira une chanson d’amour pour elle en rentrant le soir même. La tête en sang sur le bitume, Naruo se rappelle qu’il n’a jamais osé lui montrer cette chanson, et décide qu’il lui fera écouter dès qu’il sera rentré. Et c’est résolu à faire ce grand pas que Naruo s’éteint pour toujours…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec le tome final de ce dyptique, Inio Asano finit de nous convaincre qu’il est définitivement un narrateur hors paire, subtil, nuancé, surprenant et juste. Sans porter de jugement ni apporter de réponse, celui-ci se contente de nous faire suivre l’évolution des protagonistes lors d’un passage crucial de leur vie, celui de l’adolescence à l’âge adulte, nous montrant ainsi que cela ne se fait pas du jour au lendemain avec la simple obtention d’un diplôme, comme voudrait le leur faire croire la société, mais qu’il s’agit plutôt d’une évolution lente, graduelle et différente pour chacun. Et surtout que se fondre dans la masse, se résoudre à rentrer dans un moule, n’est ni synonyme de maturité ni absolu. Ainsi, Meiko, malgré son travail « bien comme il faut » ne trouve aucun sens à sa vie après la mort de Naruo et ne retrouvera son chemin qu’après s’être mise en dehors de la route habituelle, lorsqu’elle décidera finalement de reprendre la place de feu son amant dans le groupe de rock pour maintenir sa mémoire et rappeler au monde, ainsi qu’à elle-même, que ce dernier a bel et bien existé un jour. L’auteur utilise un ton doux-amer, alternant des moments tragiques avec des délires, parfois juste un clin d’œil meublant un arrière-plan, et met en scène des réactions réalistes pour ses personnages. Une saveur de la vie très juste. Le graphisme est à son meilleur niveau : dessins impeccables, réalistes, fournis en décors et en effets maîtrisés, tramage magnifique, découpage cinématographique… L’auteur conclue son récit en évitant les pièges d’un final convenu et laisse ses personnages à un moment où tout est encore possible pour eux et où rien n’est donc écrit ou gagné d’avance. Ni optimisme ni négativisme exagéré, c’est la vie… Si vous souhaitez lire une histoire un brin comique, réaliste, et émouvante à vous arracher des larmes, n’hésitez pas et jetez-vous sur cette œuvre majeure du 9ème art !