L'histoire :
A 17 ans et 10 mois, Julie Walon a fait ses bagages le jour où elle s’est disputée avec sa mère à propos d’un garçon, direction chez son père... au Japon ! Pour les 2 mois qu’il lui reste à passer avant sa majorité, la jeune française compte en effet sur son paternel pour l’épauler dans son émancipation, histoire que celui qu’elle ne voit que 2 semaines par an depuis son enfance partage enfin avec elle « un peu plus que la moitié de ses gênes ». Mais, arrivée à l’aéroport international de Narita, la jeune fille déchante rapidement car son père n’est pas là pour l’accueillir. Après des heures d’attente, il n’est toujours pas venu la chercher et, la fatigue et l’anxiété aidant, Julie craque et s’effondre en pleurs. Et si son père avait eu un accident ? Que faire seule dans ce pays inconnu pour le retrouver ? Des policiers viennent alors l’aider et la voilà bientôt dans un train, direction l’adresse du papounet. Le périple dans Tokyo est déjà une vraie aventure en soi, mais Julie y fera une rencontre intéressante. Puis, arrivée chez son père, la jeune fille découvre que ce dernier est encore plus désinvolte qu’elle ne le croyait : il l’avait tout simplement oubliée ! Apprenant que sa fille compte vivre chez lui pendant deux mois, l’homme est tout sauf ravi. Après avoir réfléchi au problème, il l’autorise finalement à rester, mais à une condition que Julie s’empresse d’accepter : obtenir un premier degré d’apprentissage en japonais dans les deux mois. Ce que Julie ne va réaliser qu’après son premier cours de japonais, c’est que c’est un vrai piège que lui a tendu son père tellement la langue est compliquée. Pourtant, la jeune fille décide d’assumer ses choix et de s’investir à fond...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Publié chez Kana, Tokyo Home n’est pourtant pas un manga mais bien une BD de style européen, néanmoins un peu influencée tout de même par l’un des sujets qu’elle traite : le Japon. Première BD de la collection Kiko (qui comptait jusqu'ici deux livres écrit par Keiko Ichiguchi), cette œuvre est pourtant un ouvrage traitant principalement de l’ouverture d’esprit, de l’acceptation des différences, au sens large, que ce soit envers une autre culture ou d’autres mœurs, le tout étant certes présenté au travers de la découverte du Japon par son héroïne. Mais qu’on ne s’y trompe pas : il ne s’agit pas ici d’un carnet de voyage car le pays du soleil levant n’est que le décor choisi par le scénariste pour raconter une histoire aux valeurs universelles, histoire qu’il a d’ailleurs écrite à destination de sa fille. Le ton y est volontairement un peu candide car cet album se destine donc en premier lieu aux jeunes filles, et les auteurs nous y présentent des personnages attachants dans une ambiance toujours un peu amusante, voire même parfois loufoque. Julie, l’héroïne, est une adolescente enjouée et plutôt positive, qui n’hésite pas longtemps avant de prendre le taureau par les cornes. Sa découverte du pays se fait de manière spontanée, la jeune fille n’ayant en effet comme connaissance du sujet que quelques a priori et pas vraiment d’attentes spéciales. A travers son apprentissage de la langue, on suit son intégration dans ce nouvel environnement en même temps qu’elle devient plus mature et qu’elle construit sa relation avec son père et ses nouveaux amis - et amours -, notamment ceux du lycée international de Tokyo. Romances, amitiés, jalousies, camaraderies... l’adolescente a une vie pleine de rebondissements qui donne à cette comédie sentimentale un peu de sel et même quelques surprises étonnantes (Julie participe même à un match de catch !). En parallèle, le lecteur peut découvrir quelques pans de la culture du soleil levant : cosplay, hanami, catch à la japonaise, etc. Pour autant, les auteurs n’oublient de faire eux aussi un pont entre les cultures et nous servent par exemple quelques gags inspirés de l’univers de la BD franco-belge (notamment avec certaines des blagues les plus célèbres des albums d’Astérix qu’on peut voir reprises lors d’un entraînement de judo - tout un symbole). Réalisé à l’encre de Chine, en noir et blanc, cet ouvrage est également de très bonne facture avec un packaging soigné, une illustration de couverture très sympathique, un papier de très bonne qualité, un encrage impeccable et une construction solide. Les graphismes de Cyrielle, qui officiait jusqu’alors en tant qu’illustratrice jeunesse, collent tout à fait au récit et sont tout comme ce dernier plein de fraîcheur. Ils proposent parfois quelques clins d’œil à la pop culture japonaise (yattaman, doll à découper et à cosplayer, le prof de judo qui est un sosie de Ryu de Street Fighter...) et se montrent tour à tour justes, imaginatifs, ou touchants (avec une mention spéciale pour la scène où Julie reçoit une lettre de son ancien amoureux français). Bref, le style de la jeune dessinatrice fait mouche et plaira facilement aux petits bouts à qui ce livre s’adresse en priorité. Un ouvrage agréable, bien réalisé, à plusieurs niveaux de lecture et qui plaira aussi bien aux jeunes qu’aux autres : pour un premier tir (premier de la collection Kiko et première BD de Cyrielle), voilà une très belle réussite !