L'histoire :
Année 1871, territoire du Wyoming, quand vient le printemps. Hikosaburô et Manzô sont deux samouraïs exilés aux Etats-Unis depuis la chute de leur daimyô (seigneur féodal japonais). Ils ont fui leur pays dans l’espoir d’une vie conforme à leur idéal de justice et d’honneur, ailleurs. Au cours d’une chasse au cerf, ils secourent une jeune indienne venant d’accoucher, seule, derrière un buisson. La jeune femme paraît très affaiblie et Hikosaburô n’a pas le cœur à la laisser. Doucement, l’indigène reprend des forces. Peu à peu – mise en confiance par l’attention témoignée – elle commence à parler. Il y a quelques temps, son village a été attaqué par les Blancs et sa tribu disséminée. Son mari est mort au combat. Elle était déjà enceinte. Vendue à un négociant en boisson, elle éprouva de plus en plus de mal à travailler, son ventre s’arrondissant. Elle prit donc la décision de fuir. Et aujourd’hui, on la traque. Les chasseurs engagés ne tardent pas d’ailleurs à se présenter à la porte. Les deux samouraïs refusent naturellement de la livrer. Ils offrent de rendre l’or que la jeune femme eut le tort d’emporter dans sa fuite. Mais les chasseurs blancs ne l’entendent pas ainsi. Alors que la situation s’apprête à virer au drame, l’intervention providentielle de guerriers oglalas sauve nos amis, une flèche venant se ficher en travers de la gorge du dernier opposant menaçant, encore vivant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Reconnu comme un maître depuis – notamment – ses chefs d’œuvre introspectifs tels Quartier lointain ou Le Journal de mon père, Jirô Taniguchi bénéficie d’un rayonnement dont nul autre Japonais ne peut se targuer. Au rayon manga, il y a sans doute deux grands noms retenus du lectorat grand public européen : le défunt Tezuka et le toujours contemporain, Jirô Taniguchi. Succès aidant, une à une, ses œuvres paraissent donc sous nos cieux, traduites en français par les soins de la maison Casterman. Daté de l’année 2002, Sky Hawk réalise un vieux rêve d’auteur, celui d’adapter en manga un genre aujourd’hui délaissé par Hollywood, celui du Western. Ce que la bande dessinée occidentale proposait, par exemple, avec Blueberry signé Jean « Moebius » Giraud, Taniguchi souhaitait l’offrir à ses compatriotes – en un mode différent cependant, selon son goût tout personnel. Préfacé par Giraud très justement (avec qui Taniguchi a collaboré sur Icare, les deux hommes entretenant une estime mutuelle), l’album se présente telle une formidable aventure humaine. Encrée dans la réalité historique – puisque ainsi aime à procéder le maître nippon – américaine, l’intrigue y introduit deux samouraïs fantasmés, à la fois témoin et pont entre les idéaux de Liberté, de Justice et d’Harmonie, supposés partagés par les cultures traditionnelles indienne ET japonaise. Un roman graphique à l’approche naturaliste et la dimension humaine indéniable. Crédibilisés par un cadre passé rigoureux, le récit embarque efficacement son lecteur. Côté dessin, la patte « taniguchienne » se reconnaît de même : irréprochable sur le moindre détail. Si l’on peut regretter un format d’édition « timide » (sans doute fidèle à l’original ?), le titre comblera les fans comme les autres. Un western sauce manga de qualité, à la droiture appréciable et à la réflexion prononcée.