L'histoire :
Il neige sur cette petite ville du Maine. Rien de bien étonnant pour un 24 décembre, juste avant la soirée du réveillon. Pour autant, avant de faire la fête, Betty Holmes regarde par la fenêtre et chacun des citoyens vaquent à ses occupations… Pour Savanah Simpson, une flic de la pénitentiaire, il s’agira d’un compte-rendu du coroner et d’un coup fil à sa maîtresse pour les promesses d’une soirée fiévreuse. Pour le flic à la retraite John Markahm, c’est une partie d’Othello avec son abruti de petit-fils (il perd, en plus !). Et pour Sarah Marcupani, l’adjointe du Maire, la préparation d’une réception : celle que l’on donne dans quelques heures pour Betty Holmes à l’occasion de ses 100 ans. La pauvre vieille vit à l’hospice depuis bien trop longtemps. Elle n’est pas bien aimable mais surtout, ne dit plus un mot depuis presque 60 ans. Totalement muette depuis « Le drame des frères Harrys », un fait divers sordide qui l’avait également contrainte à être relevée de ses fonctions d’institutrice. Elle n’a rien dit depuis. Et pourtant, en ce soir de centième année et de réveillon, elle décide de se mettre à table. Pas pour manger du gâteau, mais pour faire des révélations à John Markahm, celui qui était en charge de « l’affaire Harrys », à l’époque…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Une troublante disparition d’enfants vieille de 60 ans… Une ancienne institutrice muette depuis plus d’un demi-siècle qui veut se mettre à jacasser le soir de sa centième année… Un vieux flic, une brochette savoureuse de seconds rôles, un 24 décembre enneigé et le troublant souvenir laissé par un curieux bambin… En s’appropriant le petit roman noir éponyme de Joseph Incardona (Finitude – 2010), Christophe Merlin réussit à en livrer l’essentiel : la petite musique énigmatique à tendance anxiogène ; le ronron d’un humour subtil qui s’amuse des clichés du genre ; et le final surprise en forme de gros clin d’œil à un géant de la littérature à suspens. On se laissera donc facilement mener par le bout du nez de ce récit, dont la force principal réside dans la mise en scène et le fort potentiel de ce casting de personnages aux reliefs psychologiques juste esquissés. D’ailleurs, les amateurs de récits noirs sous tension regretteront peut-être le manque de densité de l’ensemble... Ou plus exactement, que l’auteur originel, puis Christophe Merlin, n’aient pas cherché à les faire revenir sur le grill un peu plus longtemps. Car force est de reconnaître que si la pirouette finale est plutôt joliment assénée, elle arrive un brin brutalement. On pourrait en dire tout autant du casting qu’on aurait aimé être mis en action plus longuement. Mais ce n’était à priori pas le choix d’Incardona qui, en mettant le paquet sur le style, la narration et la mise en scène, n’a pas donné d’autre choix à Merlin que de prendre le même sillon. En tout cas, ce polar détonne et il serait malhonnête de ne pas être au moins séduit par la force des intentions. D’autant qu’il aura fallu peu de temps pour se laisser prendre dans le filet des révélations que cette vieille Betty Holmes a décidé de faire à John Markahm le soir de ses 100 ans...