L'histoire :
Dieu et Marie sont à table et ils appellent une énième fois leur rejeton Jésus, qui fait rien qu’à glander dans sa chambre, sur Facebook. Dieu en a ras-l’auréole de ce fils ingrat et branleur. Et dire que dans 1 mois, Jésus est censé lui succéder à la tête du conseil d’administration des forces divines, quand lui prendra une retraite bien méritée ! En plus, ce jour là, il doit aussi se coltiner les remarques acerbes de son chien, Espiritus Sancti, alias l’Esprit Saint. En effet, depuis que Dieu l’a changé de colombe en bouledogue (parce qu’il est allergique au duvet), Espiritus est obligé de se lécher le fion pour s’essuyer et ça, ça lui plait moyennement. Bref, Dieu embarque son fils et son chien dans la limousine, direction le conseil d’administration. Un petit détour par le paradis, chez son psy le feu Dr Freud, lui permet de prendre conscience de cette page qu’il va lui falloir tourner, irrémédiablement. Puis une fois installé à son fauteuil de président, entouré des apôtres et des autres divinités, on lui explique que c’est la crise : le retour sur investissement est mauvais, on constate une baisse notable des actifs, les prières ne rentrent plus… Abraham suggère une petite apparition sur Terre, pour remettre les pendules à l’heure. A l’heure de la retraite, cette idée qui ressemble à une tournée d’adieu, ne déplait pas à Dieu…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jusqu’à ce jour, le scénariste Pat Perna s’était forgé une réputation d’auteur spécialisé dans l’humour et les moteurs : Paddock, Joe Bar Team, Calagan, Tuning maniacs, Camping car… Soudain, le voilà qui nous apparaît (dans un rayon de lumière divine) en s’amusant de la chose religieuse. Sa Question de Dieu met en effet en scène des héros très connus : Dieu, Jésus, Marie, l’archange Gabriel, Saint Pierre… confrontés à des problématiques on ne peut plus terre à terre. En effet, Dieu doit prendre sa retraite, au moment où la spiritualité des humains part à vau-l’eau. Bref, une belle occasion pour l’auteur de jouer sur les contradictions métaphysiques des cultes judéo-chrétiens, les jeux mots exquis, les petites failles inhérentes à tout « système » religieux (la toute-puissance aurait-elle des limites ?). Par exemple, Jésus, en pleine crise d’adolescence, dans une mouvance gothique rebelle et insolente, avec des boutons d’acné et piercé de partout, est un geek qui refuse son héritage et préfère foutre le boxon via le Mac de son paternel. Les répliques claquent plutôt pas mal, bien senties… Il faut dire que la matière première est vaste et le choix des situations idéal (quand il s’incarne en Homme, Dieu débarque à l’aveuglette à Port-au-Prince !). Perna s’est allié à une dessinatrice de choix dans le registre de l’effronterie, en la personne de Laetitia Coryn, qui a fait ses premières armes avec Le monde merveilleux des vieux. La dessinatrice déroule un style humoristique sans prétention, spontané, caricatural et adapté. Plus proche de la fantaisie impertinente et laïque que de la verve anticléricale, le résultat est un petit délire amusant, truffé de bons mots…
