L'histoire :
Un enquêteur pénètre dans un immeuble où un crime a été commis, afin d’observer le corps de la victime. Vient à sa rencontre Jorgen Fazer, délégué syndical, qui cherche à avoir des informations. Face au refus, et à la porte de l’appartement sous scellé, il s’adonne à un petit pas de danse disco.
Deux femmes boivent un verre au comptoir d’un bar. La première compte jusqu’à trois et frappe sa compagne. Au décompte, elle renverse son ballon de rouge.
Un petit homme chauve et trapu propose à une dame élancée de se réfugier sous son parapluie. A l’élan enthousiaste et séducteur de l’homme, elle le renvoie à son âge avancé.
Un propriétaire raconte au téléphone la compassion qu’il a eu pour ses menuisiers et comment toutes ses tentatives de réjouissances ont échoué.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Echecs, refus, plans foireux, voilà la matière de ce deuxième album de Bendik Kaltenborn, star de l’illustration norvégienne. Composé de travaux non publiés ou parus dans des revues telles que Dressed to Piss de son collectif Dongery, Avec style est un recueil de gags aux formes diverses et à l’humour décalé. Explorant les contraintes de genres et de « styles », il crée des parodies de polars, reprend les codes de la bande dessinée de presse, de l’illustration jeunesse, de la fantasy, du fait divers et en aspire radicalement toute substance. Sous des traits variant de la liberté à la maitrise les plus extrêmes, les personnages, anti-héros, représentants fidèles de la bêtise et de la laideur humaine nous mènent inlassablement dans le puits sans fond du… rien. Ecrivain vaniteux, propriétaire démagogique ou simples quidams, décalent la vie quotidienne vers une marge où le farfelu et le ridicule sont rois. Des hommes « au plus bas », comme l’indique le titre d’une des séquences. Toutes les dynamiques, des individus comme du récit qui les prend en charge, sont mises en échec. Systématiquement placés face à l’inaboutissement des évènements, à la vacuité narrative, nous voilà dès lors bien souvent interdits, en attente d’une chute qui ne viendra pas. Que reste-t-il de cet anéantissement du sens ? Un graphisme talentueux porté par des couleurs chatoyantes, un trait caricatural et une composition exemplaire. Un humour qui ne satisfera que le cercle des adeptes du nième degré qui tombe à plat ; entre-soi d’ailleurs fièrement mis en scène par la reproduction de commentaires de lecteurs, que les strips de « zéro » publiés pendant deux semaines dans un quotidien norvégien, ont laissés bien dubitatifs. Et une performance stylistique de détournement des très nombreuses références graphiques et littéraires distillées dans l’album, qui touchera les lecteurs complices. Une œuvre ciblée, donc…
