L'histoire :
Arlette vient de sortir de prison. Il fait nuit et c'est l'hiver dans Paris occupée. La jeune femme porte encore une robe légère, du jour de son arrestation, quelques mois plus tôt, le soir de la fête nationale. Sans savoir où elle va passer la nuit, elle se laisse inviter à boire un verre au Paradis, un cabaret où se produit une magicienne avec qui elle entame la conversation après le spectacle. Mais sa nouvelle amie apprend sous ses yeux qu'elle doit fuir au plus vite, elle vient d'être dénoncée aux autorités. Elle est juive d'origine polonaise, ce qu'Arlette va découvrir lors d'un contrôle de papiers un peu plus tard dans la nuit. Elles réussissent à échapper au fichage en prenant la fuite, mais ce qui avait débuté comme une balade nocturne prend une tournure différente. La menace est là, Arlette est persuadée que son fiancé attend son retour et qu'il va les tirer d'affaire. Mais elles vont bientôt apprendre que Félix a disparu de la circulation et n'a pas donné de nouvelles depuis plusieurs semaines.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est un étrange récit que nous proposent Patrice Leconte et Al Coutelis, signant en compagnie de Jérôme Tonnerre (un scénariste de cinéma lui aussi) leur retour sur le devant de la scène en bande-dessinée. Car le réalisateur, connu depuis quelques décennies pour ses films à succès, avait commencé sa carrière dans la BD dans les pages du journal Pilote. C'est donc un retour à ses premières amours pour Leconte, aux côtés d'un dessinateur qui appartient à la même génération que lui. Ils construisent ensemble une histoire un peu irréelle, constituée de moments forts qui se succèdent, au rythme d'une balade hors du temps malgré un contexte a priori très lourd. Les rues de Paris sont désertes, mais les caves sont animées de soirées de fête, les silhouettes de la police dont les visages restent cachés dans l'ombre constituent une menace impersonnelle qui plane sur les jeunes femmes. Les auteurs réussissent à trouver un ton unique, porté par le trait classique et les dessins légers de Coutelis. Ses silhouettes et ses décors se complètent pour former des images fortes et esthétiques, à l'image de certains films italiens contemplatifs, oniriques et drôles. On n'oubliera pas une réelle intrigue qui s'installe et la perspective d'une suite, même si ce premier tome installe avant tout deux personnages et une atmosphère.
