L'histoire :
Carol Ann est une adolescente doublement perturbée : d’étranges cauchemars la promènent dans un univers sanguinaire et violent ; de non moins troublants pouvoirs sur les choses et les êtres se manifestent dés que son adrénaline est sollicitée. Ces troubles sont loin de faciliter ses relations avec ses amis et les rapports houleux qu’elle entretient avec sa mère n’arrangent rien. Leur principal sujet de discorde : le père de la jeune fille. Un homme dont Carol Ann ne sait rien et dont sa mère veut la tenir éloignée à tout prix. Pourtant, son décès brutal contraint l’adolescente à rencontrer ce fameux inconnu… Les premiers échanges sont difficiles, mais Carol Ann accepte de le suivre à Londres où il est antiquaire. En visitant la demeure, la jeune fille est subjuguée par la beauté d’une statue que son père lui présente comme un objet dont il a hérité. La nuit suivante, à nouveau réveillé par un insupportable cauchemar ou peut-être par un appel lointain, Carol se retrouve au pied de la sculpture qui l’entraine, dés le premier contact, dans univers similaire à celui qui hante ses nuits. Rêve ou non : toujours est-il qu’elle devient prisonnière de guerriers violents qui la conduisent auprès du seigneur Hoeder, leur maître. Ce dernier, surpris que cette proie facile soit épargnée par la terrible maladie qui ronge ses sujets, se hâte de vouloir lui faire partager sa couche. Mais la bagatelle tourne court : Carol possède des pouvoirs lui permettant de contrôler les velléités de son assaillant… A Londres, Victor, son père, retrouve Crichton, un puissant homme d’affaires : il lui demande de ramener sa fille sans délai. Ce dernier s’exécute et emprunte à son tour le mystérieux passage : pas question de contrarier le seigneur Hemdal, son ancien roi…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Initialement publié en grand format couleur, revoili-revoilou le tome 1, accompagné de sa suite dans une édition intégrale petit format noir et blanc. On pourra peut-être regretter que ce choix de publication nous prive de goûter pleinement le travail de Jean-Philippe Baradat, qui rappelle les univers torturés d’Enki Bilal ou de Juan Gimenez. Néanmoins, les puristes apprécieront (en particulier via la seconde partie du diptyque), le trait brut et vif proche du croquis qui, loin de lisser le récit, renforce sa violence. Car le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on n’échangerait pour rien au monde sa place avec celle de notre petite héroïne. Qui rêverait en effet de se retrouver face (ou fesses) à un dictateur régnant sur un univers cauchemardo-fantastique ? Qui voudrait perdre sa mère et apprendre les pires ignominies sur son père ? Très rapidement, néanmoins, et même si ce genre de came n’est pas la toxine préférée du lecteur, celui-ci s’habitue à l’univers froid qui oscille entre fantastique, SF et heroïc-fantasy. D’ailleurs, si la première partie se contente de planter le décor et quelques énigmatiques jalons, la seconde nous happe littéralement, grâce au flot d’informations qu’elle délivre sans se priver. On apprend en effet tout de la genèse du fameux passage ; du rôle et du passé du père de Carol ; de ce monde parallèle gangréné par la trahison et les luttes de pouvoirs. En gommant les contours violents et effrayants de cette histoire (qui en font néanmoins le sel), on assisterait sans doute à une intrigue classique, comparable à bien d’autres séries. Ayant intelligemment construit son scénario et sa conclusion, Paul Oliveira s’offre même, via un autre cycle, la possibilité de faire vivre à Carol Ann Lewis un nouveau calvaire. Et tiens, pourquoi pas la prochaine fois en devenir le bourreau ?
