L'histoire :
Il était une fois un terrifiant loup, chef de meute, qui hantait les châteaux sur les falaises escarpées, les sinistres cimetières et les sombres forêts. Il était aussi une fois une grand-mère qui s'en allait visiter une voyante en ville. Apeurée par ce qu'elle voit, la nécromancienne offre la consultation à sa patiente, ainsi qu'une pelote de laine rouge. Elle lui conjure de tricoter ce qu'elle veut avec cette laine et que le résultat la protégera des créatures maléfiques qui rodent autour de chez elle... mais seulement jusqu'au crépuscule ! Evidemment, la grand-mère tricote un petit chandail pour sa petite-fille qu'elle aime par-dessus tout. Cela lui fait une sorte de cape, avec une capuche, que lui font essayer ses parents. Et ces derniers enjoignent aussitôt leur progéniture d'aller remercier la grand-mère en traversant la luxuriante forêt. Il ne peut rien lui arriver puisque, précisément, la capuche la protège de tout ! La fillette est contente de pouvoir faire ce trajet seule comme une « grande », pile le jour de son anniversaire. Hélas, dans le bois, l'attend le gros méchant loup, qui engage la conversation et lui propose de papoter en faisant un bout de chemin avec elle...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il était une fois un conte célèbre, empli de morale et de double-lecture métaphorique, jadis couché par écrit par les frères Grimm. Un conte qu'il n'était plus vraiment besoin de raconter tellement il était connu... à moins de le réinventer. Il était une autre fois un petit éditeur, « Les aventuriers de l'étrange », qui se trouvèrent dévorés tout cru par un autre beaucoup plus gros, Bamboo – tout en étant parfaitement favorable à cette ingestion charitable. Une fois avalé, ce dernier se rebaptisa au sein d'une nouvelle collection Les aventuriers d'ailleurs. Et tout en éditant de nouvelles choses plutôt jeunesse, il réédita quelques unes de ses meilleurs productions passées... dont ce Capuchon rouge. La relecture de Martin Powell et de Victor Rivas a en effet le double mérite de l'approche narrative originale, presque parodique, et du traitement graphique tout-public et pas niais (voir notre chronique de septembre 2022). Il y a certes un gros loup qui fout les jetons, mais aussi – ô surprise – un début de récit qu'on n'attendait pas trop, qui se déroule chez une voyante en ville. Second effet Kiss Cool : la réédition de cette version made in Powell-Rivas est suivie par une autre parodie, déjantée, signée du russe Alexander Utkin. Ce dernier dynamite complètement le mythe : il en abrège la mise en place ultra-connue, puis au moment de la confrontation, il transforme au sens premier le loup et le chaperon en des combattants berserkers manga-morphes... le tout à l'aide de 3-4 crayons gras (noir, rouge, bleu, jaune). Et les frères Grimm eux-mêmes interviennent pour remettre un peu d'ordre dans cet étonnant bazar qui explose pleine page. Amusant...