L'histoire :
Lorsque le facteur débarque ce matin-là dans la basse-cour de Lucienne et Georges, une des lettres qu'il apporte risque bien de changer la vie de la vieille dame. La société Outillor lui annonce en effet qu'elle est l'heureuse gagnante de la somme de 200 000 euros ! Une aubaine dont elle n'osait pas rêver, et qu'elle partage immédiatement avec son mari qui, tout occupé à tenter de réparer son tracteur, lui conseille néanmoins de lire les petites lignes. Il n'en est pas question. D'ailleurs, il n'y en a pas, de petites lignes, Lucienne n'a nullement l'intention de passer à côté d'une somme dont elle imagine très bien ce qu'elle en ferait. Elle pourrait par exemple aider beaucoup plus d'enfants à travers le monde, comme la petite Sofana qui vient de lui envoyer une lettre du Cambodge pour la remercier de lui permettre, grâce à ses dons réguliers, d'aller à l'école tous les jours. Alors elle décide d'aller récupérer son dû, en commençant par le marché du village où justement un camion de chez Outillor est installé. Sur la route, elle fait une pause au cimetière pour aller fleurir la tombe de Michel.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Lorsque Lucienne se rend au cimetière du village pour déposer des fleurs sur la tombe d'un dénommé Michel, on comprend que, derrière cette chronique provinciale, se cachent probablement des souvenirs de l'auteur. Aurélien Ducoudray met en scène les habitants du village de son enfance, et ses propres grand-parents dans des scènes amusantes et très affectueuses. Il porte sur eux un regard bienveillant, décrivant très justement de quelle manière la vie des plus anciens peut parfois être accaparée par un petit détail qui remplit une journée. Page après page, le panorama s'élargit pour finalement dépeindre tout le hameau, alors que Lucienne devient un personnage central dont on comprend petit à petit la formidable motivation. Le dessinateur Gille Aris plonge avec aisance dans ce milieu de petits vieux aux gueules très marquées. Il réussit des visages vraiment crédibles, anguleux, marqués par l'âge, et éminemment sympathiques. Le profil de Georges, casquette sur la tête et plongé sous le capot de son tracteur est totalement crédible ! Tout comme celui de l'ancien militant communiste. Du bon boulot par ce complice de Ducoudray avec qui il a déjà réalisé la Balade de Dusty. Les auteurs sont à l'unisson pour une chronique paysanne et familiale qui décrit sans effet dramatique inutile le destin d'une femme simple mais particulièrement forte. Au milieu d'une galerie de personnages drôles dont les moments de vie ressemblent à autant de souvenirs d'enfance.