L'histoire :
En juillet 1954, Paul Guénot, ancien résistant, débarque à Alger pour s’y installer en tant qu’instituteur. Il y est accueilli par un ancien compagnon d’arme, Pierre Moulan, promu entretemps lieutenant. Ce dernier ne tarit pas d’éloge sur Paul, qui s’est visiblement distingué en héros durant les années de maquis. Paul se fait conduire chez Amine, un ancien compagnon d’hôpital avec qui il partage une passion pour le cinéma. Accueilli bras grands ouverts, il est présenté à la petite famille : l’ainé mystérieux Nasser, Asia la charmante fille cadette et Yasmina la bouillante petite dernière. Les premières semaines, Paul se fond dans la société algéroise et intègre le lourd climat de revendications politiques : la guerre d’indépendance mijote. Il en profite pour se rapprocher d’Asia… jusqu’à l’inviter à sortir avec lui. Amine mais lui fait comprendre qu’il s’agit d’une pratique occidentale et qu’il devra se méfier : les mœurs de la société algérienne sont différentes. C’est alors que le climat social se dégrade : le FLN multiplie les attentats, les militaires français durcissent leur répression et leurs comportements colonisateurs. Paul se retrouve plus d’une fois en porte-à-faux, tiraillé entre son patriotisme et l’amour pour ce peuple, entre Pierre et Amine…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le scénariste Laurent Galandon n’aime rien tant que les histoires poignantes, d’amour, d’amitié ou d’humanité, sur fond de crise historique authentique. Après l’antisémitisme de L’envolée sauvage sous l’occupation, la quête d’identité par un Enfant maudit en mai 68, Galandon s’intéresse aujourd’hui à la société algéroise aux prémices de la guerre d’Algérie. Pour ce faire, il a accommodé aux petits oignons un héros d’une ambivalence subtile ! Amoureux de son pays et d’une algéroise, patriote et communiste, Paul a du sang sur les mains et demeure pourtant foncièrement respectueux de l’humain. Dans le contexte de la guerre d’indépendance algérienne, ce héros réprouve les comportements colonialistes tortionnaires des militaires, des méthodes qu’il a jadis fait sienne, dans un tout autre contexte de guerre. Il incarne magnifiquement la difficulté du choix politique, il symbolise cet entre-deux instable où l’on hésite entre la radicalité ou l’extrémisme. Le dessin de Daniel Alexandre, dit A.Dan, met en relief cette tragédie romantique sur fond de guerre à l’aide d’un trait semi réaliste un peu épais, qui se cherche et manque encore de régularité et d’automatismes, mais qui montre la tempérance graphique idoine. De la psychologie des personnages aux dialogues, en passant par l’authenticité des évènements historiques, tout sonne extrêmement juste dans cette première partie de diptyque. Une nouvelle fois, Galandon persiste et signe dans la cour des grands.