L'histoire :
Devant le guichet de l'administration de la police maritime à Hambourg, le docteur Grossgrabenstein fait un esclandre car le fonctionnaire derrière le guichet n'est pas en mesure de lui donner l'autorisation dont il a besoin pour entreprendre une nouvelle campagne de fouilles en mer du Nord. Il finit par avoir gain de cause en utilisant sa réputation de grand scientifique auprès d'un supérieur, et peut préparer son départ du lendemain. A Londres, dans le cadre feutré du Centaur Club, Francis Blake et Philip Mortimer se retrouvent autour d'un whisky. Mortimer a été chargé par le gouvernement d'une vaste étude sur l'approvisionnement du pays en énergie. Il va partir en Ecosse pour étudier le potentiel de la géothermie, prévoyant que la dépendance choisie au charbon, puis au pétrole, prive son pays de sources plus autonomes et plus propres. Alors que les deux hommes sont pris par leur conversation, une boule de lumière traverse l'obscurité du ciel et plonge dans les eaux de l'embouchure de la Tamise. Quelques minutes plus tard, une silhouette en combinaison sort de l'eau, croise des passants éméchés qui sortent d'un pub, les neutralise à l'aide d'un puissant rayon, pour finir par décoller du sol et entrer par la fenêtre d'une chambre mansardée. C'est le lieu d'un mystérieux rendez-vous. Deux protagonistes vont retrouver un trafiquant d'art notoire pour lui proposer des pierres très rares. Quelques jours plus tard, des pêcheurs écossais croisent le bateau d'un de leurs collègues qui dérive sur l'eau, entouré d'une inquiétante volée de mouettes. Ils s'approchent pour découvrir que l'équipage est mort, les corps gisent sur le pont, sans qu'aucune trace de violence puisse expliquer ce qui s'est passé. C'est le premier signe d'un étrange phénomène qui se déroule au large, et dont très bientôt Mortimer va être le témoin.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce nouvel épisode commence impeccablement, avec une série d'évènements mystérieux dans la pure tradition de la série, qui nous conduisent en une dizaine de pages vers le vrai démarrage de l'intrigue. Quelque chose se passe en mer du Nord, qui provoque des phénomènes mortels, et va même menacer des villes entières, comme il se doit dans une aventure des héros de E.P.Jacobs. A mesure que l'enquête progresse et que les phénomènes inexpliqués se multiplient, les indices se regroupent autour d'une zone en pleine mer, entre les frontières anglaise, danoise et norvégienne : la région du Doggerland qui reliait il y plus de 20 000 ans les pays désormais séparés par la mer. Yves Sente va ainsi renouer avec le Docteur Grossgrabenstein, scientifique passionné du Mystère de la Grande Pyramide, mais aussi avec une intrigue majeure de la période Jacobs. Nous n'en dirons pas plus pour ne pas spolier le plaisir de lecture, mais les efforts déployés par le scénariste sont assez appuyés. Ils se transforment en de longues plages centrales laborieuses qui écartent quelque peu nos deux héros des enjeux de l'aventure. Peter Van Dongen va ainsi reproduire des éléments graphiques originels de Jacobs, avec son trait à la fois très fidèle et sensiblement plus léger que celui du créateur de la série. Le dessinateur s'amuse avec les codes graphiques, comme la case ronde en plein centre de la planche, que Jacobs utilisait en fait très peu, mais qui fait vraiment vintage. Il est d'ailleurs évident que Van Dongen a choisi de rester dans le style graphique du Jacobs de la première époque (disons les années 1950). Un retour vers les derniers albums de la série d'origine montre que le créateur de la série était devenu lui-même beaucoup plus réaliste dans son style, c'est frappant dans l'Affaire du Collier. La Menace Atalante ne sera en tout cas pas le meilleur album de l'époque contemporaine. À vouloir trop en faire, le scénario s'étire et ne parvient pas réellement à captiver, même si les compétences de Mortimer en géothermie sont une vraie révélation.