L'histoire :
Ce samedi soir, un jeune homme est installé au bar d'une boîte de nuit, en train de siroter un drink... Son regard croise celui d'une jeune fille plutôt sexy et la conversation s'engage. Elle s'appelle Marine, ne vient pas souvent ici et elle accepte de danser avec lui. La nuit égraine ainsi ses minutes, rythmées par les basses surpuissantes des tubes dansants... et les deux jeunes gens accrochent visiblement. Vient alors l'heure de partir : le garçon propose de raccompagner la fille jusque chez elle, ne serait-ce que pour la protéger de toute agression. Des regards complices se croisent de nouveau... Le garçon jette son blouson de cuir sur les épaules de la fille... Et finalement elle lui propose de monter chez elle. Dans son appartement, vient le moment du premier baiser et du gros câlin.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Attention, ce petit ouvrage souple est une première du genre et ouvre des perspectives éditoriales intéressantes, en lien avec l'ère du livre numérique. Mais à l'origine, existe le livre en papier, « physique », qui propose une histoire sentimentale bateau dessinées en noir et blanc et en peu de cases (souvent des pleines pages muettes). Cette rencontre amoureuse entre deux jeunes gens en boîte de nuit se concrétise ensuite chez la demoiselle. Eh oui, dans cette simple phrase se trouve le scénario in extenso ! L'idylle peut effectivement se découvrir ainsi, au premier degré, via ledit livret, et à condition que le lecteur ne remarque pas des « QR codes » placés dans le décor. A ce moment, faisons une petite parenthèse didactique à l'intention des gros ringards qui ignorent ce terme. Le « QR code » est comme un code-barre, mais en plus complexe : il se présente sous la forme d'un carré noir et blanc plein de petits carrés noirs ou blancs (25x25), dont l'agencement précis permet d'indiquer une référence numérique complexe. Une fois qu'on a compris ça, on se dit alors qu'on a tout loupé et que la substantifique moelle se trouve en allant visiter les contenus interactifs indiqués par les QR codes, à l'aide de l'application pour smartphones indiqué en intro du livre et en 4ème de couv. La manip est certes pour le moins fastidieuse, à la longue (il y a 48 QR codes !). Surtout, elle impose de sortir du contexte de la lecture pour scanner les codes, tip-tiper sur son smartphone (ou sur Internet) et découvrir la séquence cachée. Néanmoins, on fait l'effort et... tadaaam : on s'aperçoit que ça n'apporte strictement rien au scénario. Certes, ces contenus sont de formats variés, car ils contiennent diversement de l'animation, de la musique, de nouveaux écrans dessinées sous une autre forme séquentielle... mais ils remplissent les ellipses de scènes consensuelles, attendues et largement dispensables. Evidemment, on parie volontiers que les statistiques de visites battront des records sur la scène finale de la relation sexuelle. En ce sens, les auteurs soulignent astucieusement le caractère voyeur du lecteur. La méthode trouve surtout sa raison d'être à travers son caractère novateur. Elle est une version bêta qui présente les diverses facettes de la lecture interactive numérique : on peut partager ces séquences sur les réseaux sociaux, varier les types de contenus... mais encore faudra-t-il à l'avenir que l'histoire ait un intérêt. Bravo donc pour l'idée, car les auteurs ont l'immense mérite d'être des pionniers du procédé ; mais pour l'originalité du scénar, on repassera...
