L'histoire :
En 1845, dans un lupanar de Charleston, sur le littoral de la Caroline du sud. Au terme d’une nuit de poker fructueuse, Wilson récupère son ami Legrand en charmante compagnie, dans une chambre à l’étage. Ils sortent tous deux prendre l’air sur le quai du port et se séparent. Tandis que Wilson part racheter quelques uns de ses propres biens au préteur sur gage local, Legrand retourne en barque sur l’île de Sullivan, où il a construit sa baraque. Il y retrouve son fidèle Jupiter, un esclave affranchi, qui l’avertit de la visite courtoise du lieutenant Garth. Tous trois s’en vont prendre l’air du large, sur la plage de l’île. Au hasard de leur promenade, ils tombent sur l’épave vermoulue d’un galion, que nul n’avait jamais remarqué. Tandis que Garth fait une rapide inspection de l’intérieur, Legrand trouve à proximité, sur le sol, un étrange scarabée de couleur or. Il se blesse en le ramassant et c’est finalement Jupiter qui s’en saisit à l’aide d’un parchemin également trouvé sur place. Garth emporte à terre le spécimen, pour une étude approfondie, tandis que Legrand et Jupiter retournent dans leur cahute. Ils y retrouvent Wilson, qui est venu faire une visite surprise, et ils lui racontent l’anecdote. Pour appuyer son récit, Legrand dessine le scarabée sur le parchemin qui a justement servi à l’attraper, et le tend à Wilson. En faisant un mauvais geste, ce dernier manque de le brûler et le regarde. Ce qui apparait alors n’a strictement rien à voir avec un scarabée…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La simple évocation de son nom suffit d’ordinaire à faire frémir ceux qui en ont parcouru les intrigues d’épouvante en roman : Edgar Allan Poe ! Pour débuter l’adaptation des célèbres Histoires extraordinaires de ce dernier, Roger Seiter a choisi l’aventure la plus lue du vivant de l’auteur (car écrit dans ses jeunes années) : le scarabée d’or. A l’époque traduite et popularisée en France par Charles Beaudelaire himself, celle-ci fit notamment la renommée de Poe car elle abordait pour la première fois les procédés cryptographiques (un code à déchiffrer pour obtenir une carte au trésor !), mais aussi l’écriture logographique ou hiéroglyphique (le capitaine pirate Kidd est symbolisé sur le parchemin par le dessin d’un chevreau = kidd en anglais). En soi, la trame de cette première enquête logiquement éditée au sein de la collection Ligne rouge (polars), n’a rien de spectaculaire, c’est même tout le contraire. Avec la rigueur littéraire dont Seiter a déjà fait preuve sur Mysteries, le scénariste adopte la même rythmique descriptive et posée que dans la nouvelle originale. Les protagonistes ne sont pas antagonistes, le mystère est somme toute très banal (considéré avec les yeux de notre époque) et surtout on ne peut plus cartésien. Enfin, l’action est quasiment absente de ce premier tome (à l’exception d’un combat final). Seul compte alors le talent graphique de Jean-Louis Thouard pour rendre l’atmosphère oppressante. Sur un joli coup de crayon, à la fois précis, travaillé et tourmenté, ce dernier utilise des teintes systématiquement ocre, rouille, grises, sombres et le plus souvent glauque. Ce graphisme peut paraître sombre ou étouffant au premier coup d’œil, mais il s’avère rapidement idoine à l’ambiance. A noter que Seiter insère cette première énigme au sein d’une autre aventure en fil rouge, qui devrait permettre de relier nos protagonistes à d’autres histoires extraordinaires à venir… enfin terrorisantes ?