L'histoire :
Dans les années 30, sur un îlot sauvage au large de l’Irlande, un vieil homme sur son lit de mort fait une confession à sa fille Marcia. Elle n’est pas de son sang : lui et sa femme l’ont recueillie après qu’elle ait été abandonnée, il y a 20 ans, par un père en fuite, durant une nuit d’orage. Le vieux pêcheur meurt et la mère adoptive de Marcia termine les révélations, afin de l’épauler dans sa quête de vérité. Avant de repartir à bord de son inquiétant yacht baptisé Dulcibella, son père, au regard de fou, avait gratifié le poupon d’une caissette emplie de vieille monnaie. Marcia fait son paquetage et se rend à terre, en ville, pour faire expertiser ce trésor. Un antiquaire lui apprend qu’il s’agit de Sesterces de Carausius, rarissimes, surtout en cette quantité, et qu’il y en a pour une véritable fortune. Pendant ce temps, le conservateur du British Museum, qui a vent de ce magot par le biais d’une lettre officielle, informe une mystérieuse loge maçonnique à la solde du pouvoir nazi, de ces Caraudisus. De son côté, la jeune femme poursuit ses recherches sur l’île de Pregnant Island, où elle retrouve dans une cale sèche les vestiges de la Dulcibella ! La vieille comtesse Bradley-Stanford, propriétaire de la cale, lui offre alors le précieux livre de bord et complète ses informations : 20 ans auparavant, lorsque le yacht fut trouvé à la dérive, les gardes-côtes avaient décroché une jeune femme morte crucifiée sur la proue…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cet épisode d’exposition livre rapidement ses axes narratifs, qui sont autant de mystères liés à l’aventure maritime historique, aux sociétés secrètes et aux puissances occultes. Trois thèmes en vogue actuellement au sein du 9e art, et qui ont déjà été associés dans le triptyque L’auberge du bout du monde (au sein de la même collection). Néanmoins, le scénariste Yves Leclerc focalise plutôt son intrigue du côté du célèbre mage Aleister Crowley, plutôt que des habituelles légendes celtiques liées aux embruns. Occultiste et écrivain sulfureux, Crowley (qui a réellement existé !) est en effet à l’origine d’un ouvrage ésotérique, le livre sacré de Thelema où il décrit l’essence d’un système philosophique dérivé de Rabelais. Evidemment, vue l’époque (les années 30) et le sujet (l’occultisme), l’ombre du nazisme est associée à ces aventures maritimes, qui s’ouvrent à un vaste champ de rebondissements potentiels. De son côté, le dessinateur Stéphane Heurteau fait son entrée chez un « grand » éditeur, après avoir pas mal évolué chez le Cycliste, Albin Michel ou Carabas. Il livre ici un joli travail, plus convaincant sur les séquences maritimes et la gestion des ambiances, que sur la régularité des personnages (Childers est très changeant). Bien que disposant encore d’une certaine marge de progression (notamment côté détails et proportions), son dessin et ses couleurs s’avèrent néanmoins idoines à la mise en relief de ces mystères maritimes. Ce premier tome livre donc son lot de mystères, qui ne demandent qu’à être éclaircis (ou amplifiés) au cours des prochains volumes… En effet, quel rapport cette énigme a-t-elle avec Socrate ? Avec Carausius, empereur des Gaules et roi des mers ? Marcia serait-elle la fille de Crowley ? Tataaam…
