L'histoire :
12 novembre 1970. Le général de Gaulle est mort. Son cercueil est porté par quatre de ses plus fidèles gardes du corps : Alain Zerf, Max Milan, Georges Bertier et Jean Brémaud. Autour d’eux, le chef Ange Santoni veille. Et dans l’ombre, Jacques Foccart, dit « le Chanoine », tire les ficelles. Derrière cette image figée d’un hommage national, il y a des trajectoires, des blessures, des fidélités complexes. Flashback, onze ans plus tôt, à Mostaganem. Alain Zerf tente de protéger sa sœur Fauzia et son mari Salah, ainsi que leurs enfants, tous menacés par les exactions du FLN. À Paris, Pierre, opéré du cœur, doit passer le flambeau et céder la direction du SAC à Ange Santoni. Flic droit et respectueux de la Loi, Santoni se pose des questions sur cette nouvelle affectation, alors que sa femme Rosa, rêve déjà d'un bon coup de piston pour leur fils Matteo, détaché en Algérie. Georges Berthier, ancien vice-champion de boxe surnommé « La Pince », traîne ses poings dans une salle de sport, quand Max Milan, tout juste reçu major au concours du FBI, est recruté pour une autre mission : protéger le président le plus exposé du monde. À son retour à Paris, il retrouve Jacques Foccart, qui le briefe sur la situation en Algérie. La guerre n’est pas gagnable, seuls les militaires le croient encore. Le seul capable de rétablir la paix, c’est de Gaulle. Dans une voiture lancée vers l’Élysée, les futurs gorilles convergent. L’équipe est en place. Les choses sérieuses peuvent commencer...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
De Gaulle, c’est comme un vieux poste de télévision posé dans un coin de la Mémoire nationale : on a beau ne plus le regarder, il continue de grésiller au fond de la pièce. Avec Les gorilles du Général, Xavier Dorison rallume l’écran. Mais plutôt que de raconter le grand homme, véritable figure tutélaire, il zoome sur ses gardes du corps – des barbouzes loyaux, rugueux et aux failles émotionnelles cachées – plongés dans les années de plomb de la Ve République. Ici, le thème abordé focalise sur les conséquences de la guerre d’Algérie. Inspiré de faits réels mais librement réécrit, le scénario s’autorise de grandes libertés historiques (dans les dates et dans le nom des personnages) pour mieux nourrir l’émotion et la tension narrative. C’est dense, ciselé et parcouru d’un argot gouleyant à souhait (la gouaille à la sauce Michel Audiard). La cambuse, par exemple, petit mot tombé des gamelles, désigne la cantine et ça fait du bien de le recroiser. Bamboche pour tout le monde ! Le dessin de Julien Telo, digne héritier de Sylvain Vallée, campe l’époque avec vigueur : regards pénétrants et rues poisseuses, grandes gueules. Et puis il y a le mystérieux Chanoine, alias Jacques Foccart pour les initiés, patron du SAC, silhouette d’ombre aux méthodes obscures. Thriller politique, drame humain, roman noir : cet album inaugural impose un ton, un souffle, une ambition. La suite est déjà attendue au tournant : deux autres épisodes sont prévus, Colombey et L’ami américain.