L'histoire :
Officier courageux en première ligne du front de la Grande Guerre, Louis Moufflot est un miraculé. Laissé pour mort sur le champ de bataille avec trois balles dans le buste, il a été recueilli et soigné par les prussiens… mais il s’est évadé, d’impudente et rocambolesque manière. De retour à Paris, où tout le monde le croyait mort, il doit désormais rester à l’arrière, pour se remettre de ses blessures. Mais l’homme est pugnace et énergique. Il soumet une idée à son état-major, qui doit faire face aux rigueurs de l’hiver : utiliser des chiens de traineau en provenance d’Alaska. Moufflot a en effet vécu et prospéré quelques années là-bas, et il connait l’extraordinaire avantage de ce moyen logistique. Chaque équipage peut en effet trainer jusque 600 kg de matériel. Toutefois, Moufflot en est revenu amer, après l’incendie de son entrepôt et un mystérieux clash avec l’un de ses partenaires, Scotty. Aujourd’hui, Moufflot compte sur le soutien d’un autre officier, Melun, pour débloquer le budget nécessaire à l’importation de 400 chiens ! Il ignore que Melun est déjà sous pression d’un puissant armurier, Fournier, pour que l’armée française achète ses véhicules autochenilles. Il ignore aussi que sa femme, Jane, a jadis été l’amant de Melun, et que ces deux-là complotent de nouveau en cachette…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La chronologie de ce récit se déroulant durant la première guerre mondiale parait à strictement 100 ans d’écart des évènements romanesques qu’il décrit. Après Moufflot, Hiver 1914 (paru en automne 2014), voici au printemps 2015 Melun, Printemps 1915. Melun, c’est le nom de l’officier rival du héros trompe-la-mort Moufflot (présenté au premier tome). A contrario, Melun est un « planqué », certes à l’arrière, mais il joue un double rôle décisif, à la fois dans les tactiques d’Etat-Major et dans la vie personnelle de Moufflot. De fait, ce second épisode délaye un peu la problématique d’importation des chiens de traineaux sensés apporter un soutien logistique sous la neige – ce fil rouge se développe tout de même fort bien en tâche de fond. Mais c’est au profit d’une consolidation de la psychologie des personnages et de sa complexification, cohérente et humaine, et d’une chronique passionnante à l’arrière de la Grande Guerre. « Une de plus », certes, mais différente, qui ne se départit point d’une reconstitution fidèle et poignante de ce terrible conflit. Les co-scénaristes Michael Delbosco et Daniel Duhand ont semble-t-il affiné leur récit avec minutie, étayé par une science des dialogues aux petits oignons, qui sonnent authentiques. Le dossier et les documents annexes prouvent d’ailleurs l’authenticité historique de la démarche ! Le dessin « nouvelle BD », stylisé mais parfaitement maîtrisé, de Félix Brune, se montre parfaitement au niveau de l’ambition. De larges cases de vues d’ensemble prouvent son sens du cadrage et de la reconstitution, tandis que les palabres nécessaires sont idéalement rythmés. Etant donné le titre et la couverture dévoilée en fin d’album, le troisième opus à venir devrait nous faire entrer totalement dans le sujet des chiens de traineaux, sans doute en nous dévoilant encore bien des pans mystérieux du passif des personnages…