L'histoire :
« Je serai une héroïne ! Quoi que je fasse plus tard, ce sera formidable, difficile, excitant, grand ». Une exclamation programmatique et ambitieuse de la petite Niki de St-Phalle, double artistique et fantasmé de Catherine Marie-Agnès. Née d’une famille d’aristocrates et de parents peu concernés par son existence, elle est, dès son plus jeune âge, amenée à se déraciner régulièrement : Château de Fillerval dans l’Oise, Connecticut, New Jersey, New York City. Jeune fille angoissée et inadaptée aux cadres dans lesquels elle évolue, seul son alter ego lui permet de trouver les moyens d’exorciser ses peurs profondes, et de vivre avec le venin de serpents abuseurs. C’est donc dans un imaginaire impétueux qu’elle trouve refuge, source de son énergie créatrice et libératoire, qui aboutira aux Tirs, à la fontaine Stravinsky ou aux Nanas.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le monde étant toujours bien fait, c’est au moment où une grande rétrospective de Niki de St Phalle est exposée au Grand Palais de Paris que paraît cet ouvrage biographique. Vingt-deux chapitres gouvernés par les figures du tarot divinatoire, pour lequel l’artiste a voué une passion, retracent les épisodes de sa vie de femme à l’extravagance légendaire. Son caractère tumultueux, instable et éminemment créatif y est fidèlement dépeint, ainsi que ses rencontres et les phases de réalisation de ses œuvres. Les évènements restent malheureusement accolés les uns aux autres dans un rythme narratif effréné qui finit paradoxalement par installer un ennui certain. Faute d’une réelle assise historique ou artistique, les situations se succèdent dans un simple habillage informatif et factuel, au gré d’un récit à la première personne qui peine à suppléer le manque de consistance des dialogues. L’inscription, au sein des images ou dans leur marge, des symboles récurrents de l’histoire de St Phalle révèle une tentative intéressante de contrebalancer le tout chronologique. Les formes tirées de ses sculptures (cœurs, serpents…) et les touches de couleur disparates de Dominique Osuch sur le crayonné gris de Sandrine Martin invitent graphiquement l’esthétique de l’artiste dans le déroulé biographique, signe d’un imaginaire, d’un art, de névroses enveloppant chaque moment de son existence. La narration figurative est ainsi nourrie d’une expressivité bariolée apportant tout son intérêt à l’album. Mais certaines maladresses dans cet effet et la naïveté du trait de la dessinatrice (qui aurait peut-être été du goût de Niki ?) ne convainquent pas suffisamment. Si les deux auteures ont à l’évidence cherché à investir les libertés offertes par la bande dessinée pour emplir leur ouvrage de la personnalité percutante et l’art monumental de St-Phalle, le résultat, lui, manque d’envergure.
