L'histoire :
Paris, printemps 1905, rue de Siam. Anne-Marie est enceinte. Son mari en mer sur « la Tourmente » pour de longs mois, elle comble son absence en se réfugiant dans la littérature. Bientôt, il sera emporté par la fièvre jaune et ne connaitra que très peu son fils, Jean-Paul. En 1910, élevé par sa mère et son grand-père qu’il apprécie beaucoup, le petit Poulou rentrera trop prématurément au lycée Montaigne dont il sera refoulé pour une orthographe désastreuse. « il ne savent pas se qu’il rate » déclare sa mère que ça ne catastrophe guère. Son Poulou est un fervent lecteur, nul doute que son orthographe sera bientôt excellente ! La Rochelle 1917. Sa mère se remarie avec Joseph Mancy, ingénieur ennuyeux à souhait. Hors de Paris, Jean-Paul se languit dans cette France de province tourmentée par la Grande Guerre. C’est pour lui l’occasion de commencer à penser avec philosophie. En 1922, en compagnie de son ami Paul Nizan, Jean-Paul fête la fin de l’ère du Lycée Henri IV sur les toits de Paris. Ils rêvent ensemble d’une nouvelle philosophie, celle du XXème siècle, « simple et violente », « cartésienne et novatrice », en opposition au contingentement gratuit de la vie. L’école Normale leur ouvre alors ses portes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Par une pensée issue de son entièreté intacte, Jean-Paul Sartre a apporté à la philosophie ce que Neil Armstrong a apporté à la conquête de l’espace : une nouvelle étape. Il a posé sa réflexion sur les maux du XXème siècle. Si bien qu’à la sortie de la « drôle de guerre », l’existentialisme sera un secours pour nombre de français, souvent parisiens, certes. Sa rencontre avec Simone de Beauvoir, avec qui il forme un couple libre et fusionnel, lui donnera beaucoup de force dans sa croisade contre le conformisme immobile. Le dessin d’Anaïs Depommier offre ici de belles vues d’ensemble et bénéficie d’une colorisation singulière sans être déplacée, à l’image de l’esprit de Sartre, en fait. Les yeux des nombreux personnages sont souvent globuleux, ce qui donne à notre « héros » un air halluciné, qui ajoute de l’intensité à l’expression de lui-même, un peu comme en réalité, là aussi. Le récit de sa vie, vu par Mathilde Ramadier, accompagne les différentes étapes de réflexion du philosophe, au rythme de ses rencontres avec les beaux esprits connus et moins connus du XXème siècle. Sartre est à l’image du personnage : une intéressante immersion au cœur de l’intelligence nette de citoyens impliqués et concernés par l’histoire qui s’écrit chaque jour qui passe. Le bon sens civique émanant de la bourgeoisie de l’époque peut trouver écho parmi le peuple, pour peu qu’il laisse la place à la réflexion. C’est toute la force de l’œuvre de Sartre, l’élitisme à la portée de tous, dans le respect de chacun.
