L'histoire :
Parce qu'il s'était vanté de pouvoir conduire des camions, l'appelé Teyssier se retrouve conducteur d'un char d'assaut lors d'une des premières grandes batailles de la seconde guerre mondiale. Les Allemands viennent d'envahir la Belgique, et les troupes françaises et anglaises sont mobilisées pour enrayer leur progression. Mais une manœuvre tactique hors du commun va permettre aux envahisseurs d'encercler leurs opposants, les obligeant à reculer irrésistiblement vers Dunkerque et la mer. Lors d'un combat perdu d'avance, Teyssier se retrouve seul avec le caporal Morel, à bord d'un petit char Renault seul rescapé d'un attaque aérienne. Les deux hommes cherchent à rejoindre ce qu'il peut rester de l'armée française et font connaissance sur les routes de campagne. Morel est un va-t-en guerre sans états d'âme qui veut aller jusqu'au bout pour ralentir l'ennemi. Militant CGT sensible à l'émancipation de la classe ouvrière, Teyssier ne se reconnait pas dans un combat qui est le résultat, selon lui, de la politique menée par les tenants du capital. Mais Morel est son supérieur, il est armé et déterminé, donc il le suit. Pourtant lorsque les deux compagnons d'infortune croisent une cohorte de civils qui marchent pour fuir la destruction de leurs villages par les soldats allemands, un déclic se produit. Teyssier veut se battre pour la liberté...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour ce dernier volume de la collection, Thierry Gloris réussit son meilleur récit, racontant un fait de guerre qui précède la capitulation face à l'ennemi allemand en juin 1940. La relation entre le caporal Morel et le soldat Teyssier a toutes les dimensions d'une amitié héroïque. Le lien se tisse entre deux hommes que tout sépare a priori, mais qui se retrouvent sur un sens du devoir qui les dépasse. Le scénariste introduit intelligemment les enjeux internationaux qui précèdent la guerre et la rivalité historique entre l'URSS et l'occident. Ses personnages parlent politique et s'opposent bruyamment, alors que les combats qu'ils mènent menacent leur vie à très court terme. Le dessinateur Roman Marcos et le coloriste Dimitri Figolin sont les artisans discrets de l'épisode le plus intense de l'album, dans une scène de nuit particulièrement spectaculaire et dramatique. Les auteurs démontrent qu'un projet éditorial conçu pour atteindre le grand-public, voire susciter les commandes des bibliothèques scolaires, peut produire des récits d'excellentes factures. Bien évidemment, il faut apprécier le ton héroïque adopté par Gloris, qui ne dénonce pas les errances de l'Histoire. Il se contente de plonger le lecteur dans un épisode choisi et emblématique. Sans jugement, mais avec une admiration non feinte pour le courage de ceux qui l'ont vécu.