L'histoire :
Joséphine Koehrlen arrive sur Paris, Gare de l’Est. Nous sommes à l’automne 1928. Elle attend ses employeurs mais personne ne vient. La lettre avait pourtant indiqué le lieu et l’heure du rendez-vous. Qu’a cela ne tienne : Joséphine prend un taxi pour se rendre chez mme Declerc. La maîtresse de maison avait oublié que sa nouvelle femme de chambre arrivait aujourd’hui. Assez âgée, elle se montre tout aussi pingre que ses patronnes précédentes et elle refuse presque de payer le taxi... Elle explique à Joséphine le travail qui l’attend. Elle se renseigne également sur ses origines car elle ne veut pas de Juifs chez elle. Depuis l’affaire Dreyfus, on voit beaucoup de Juifs d’origine germanique. Joséphine la rassure : elle est alsacienne. Elles font le tour de l’immense maison et Mme Declerc finit par lui montrer sa chambre qui se trouve au sixième étage. C’est un endroit minuscule à la décoration spartiate. Néanmoins, Joséphine est satisfaite : elle gagnera plus que son travail précédent donc elle ne peut pas se plaindre. Elle commence le travail domestique en faisant du ménage dans toute la maison et en repassant les vêtements du couple. Joséphine se lie également d’amitié avec la cuisinière Yvonne, une gentille bretonne. Sa nouvelle vie commence !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La longue histoire de la famille Koehrlen prend fin dans ce troisième tome. Joséphine a bien grandi et son époque a également bien changé puisque nous sommes dans l’entre-deux guerres. Alors que les deux tomes précédents montraient le quotidien de toute la famille, cette fois, nous suivons Joséphine qui s’est exilée à Paris. Cela n’empêche pas Anne Teuf de dresser une longue galerie de personnages, au hasard des rencontres et des histories d’amour et d’amitié de Joséphine. Avec une justesse de ton étonnante et une remarquable profondeur, les sentiments et les devenirs de chacun sonnent juste. Et malgré le rendu très réaliste, à la limite du documentaire, on ne s’ennuie jamais une seconde, tant les personnages sont attachants et plein de vie. Évidemment, cette longue saga évoque en filigrane le devenir de l’Alsace dans une période trouble de son Histoire, mais toujours par petites touches et avec beaucoup de finesse et de retenue. De l’entre-deux guerres à la montée du fascisme, de l’invasion allemande à l’annexion, de la collaboration à la libération tout est abordé à travers le prisme des personnages et l’impact de ces événements sur leur vie. Beaucoup de richesses et de tons différents suivant les aléas de la vie des protagonistes, l’album passe du style Downtown Abbey à celui d’Emile Zola avec une facilité déconcertante. Le dessin aux frontières de la ligne claire et le noir et blanc particulièrement « chaleureux » soulignent l’humanité qui transpire à chaque page. Un très bel album de famille, que l’on referme avec un brin de nostalgie.