L'histoire :
A la fin du XVIIIème siècle, Justine mène à Paris une vie de misère et tente, tant bien que mal, de s’affranchir d’une éducation morale et religieuse aliénante. Elle aspire à plus de vertu et lutte pour se sortir de sa misérable condition. Sa sœur Juliette, au contraire, mène une vie de courtisane allègrement vautrée dans la luxure et la recherche sans limite des plaisirs charnels. Quand l’une évoque le mariage, l’autre lui rétorque l’oubli des bons principes. Quand l’une se pare de tous les atouts de l’honnêteté, l’autre paraît inconsciente. Voici les malheurs de Justine sur le chemin de la vertu, un chemin via lequel la pauvre jeune fille sera exploitée et sacrifiée sur l’autel de la dépravation et de la licence. Vice ou vertu, la gentille, sensible et infortunée Justine devra choisir. Et quand, fidèle à son éducation, celle-ci aura fait le choix de la moralité, commencera alors un chemin de croix bâti par ceux là-mêmes en qui elle avait toute confiance : de respectables libertins. Ou la Vertu à l’épreuve du Vice et le Vice contre l’ordre établi…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Roman sur la vertu et le libertinage, plaidoyer pour l’athéisme et l’immoralisme, Justine, premier ouvrage du marquis diffusé de son vivant, exhalait un parfum de scandale au moment de sa parution lors de la Révolution française. Sade y dissertait sur « le triomphe du Vice et la Vertu victime de ses sacrifices », puis philosophait sur les bienfaits du libertinage et de la débauche. Grand styliste de l’érotisme, l’italien Guido Crepax a adapté le roman en BD (éditée pour la première fois en 1980 en France) en restituant habilement l’esprit philosophique et l’atmosphère visuelle du livre par son dessin raffiné et détaillé, ses plans picturaux, sa fidélité aux costumes ou décors d’époque et son sens de la mise en scène, exprimant ainsi toute l’atmosphère d’un temps. En adaptant Sade sans omettre les scènes d’orgies et tout en conservant cynisme, ironie et violence du propos, Crepax ajoutait une dimension supplémentaire à la BD érotique, en lui conférant un souffle éthique ou politique profond, qui fait défaut à ce genre d’ouvrage en général. Fidèle à l’esprit, donc, on peut juste regretter parfois la longueur des dialogues choisis qui, adaptés en BD, confinent au bavardage et saturent la lecture, les dessins se surajoutant et répétant simplement le texte sans véritablement l’interpréter. Car ne l’oublions pas, Justine ou les Malheurs de la vertu demeure avant tout un roman du XVIIIème qui, dans son intégralité et avec ses mots propres, se suffit amplement à lui-même. Oui, mais il faut bien le reconnaître, Crepax lui a donné une autre dimension encore, par son graphisme classieux et son esthétique soignée. Finalement, voilà une réédition de Justine qui donne envie de se replonger dans la subversive et sulfureuse bibliographie du Marquis de Sade.
