L'histoire :
En 1891, la jeune Nora de Wing s’installe pour quelques temps à l’institut d’études psychiques de Londres, afin d’y peaufiner ses talents de médium. Elle fait rapidement la connaissance de deux artistes eux aussi intéressés par les matérialisations de l’indicible : le jeune peintre italien Francesco Guibilati et l’écrivain Henry James. Le soir même, elle participe déjà à sa première réunion de spirite et se montre d’une réceptivité étonnante : elle est possédée l’espace de quelques instants par l’esprit d’une jeune et mystérieuse jeune femme. Le lendemain, Francesco Guibilati l’emmène visiter une galerie privée entièrement consacrée à un peintre florentin décédé, Giovanni Pellini. Nora est mal à l’aise, notamment devant les portraits de spécimens humains atteints de malformations… Guibilati décide alors de pousser plus loin les expériences, en fomentant une rencontre par hypnose avec Antonia, la muse de Pellini qui a, a priori, possédé Nora. Mr Sendak, un autre résident inquiétant de l’institut, ressent alors un grand danger et tente de prévenir Nora. Il réussira à l’effrayer totalement et à se faire interner par des aliénistes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’origine de ce récit fantasmagorique, le scénariste François Rivière a imaginé un roman qu’Henry James n’a jamais écrit, trop éprouvé par l’expérience personnelle qui l'aurait suscité. Le célèbre écrivain américain tient donc un rôle d’importance dans cette histoire de possession d’une jeune spirite, par la muse d’un grand peintre de la Renaissance. D’emblée, on est épaté par les illustrations de Riccardo Federici, jeune artiste italien qui a déjà poussé son art à des hauteurs vertigineuses. D’une grande élégance, son dessin classique et naturaliste, proche de celui de son compatriote Eugenio Sicomoro, peut certes paraître un tantinet académique. Il est également inhérent à une certaine froideur et une rigidité dans les expressions des personnages. Mais on se débarrasse volontiers de cette conséquence en prenant le temps de contempler tel détail, tel relief ou telle ombre de ces planches raffinées, s’affranchissant parfois des cases. Un bémol vient toutefois modérer cet enthousiasme : Federici a tendance à mettre en couleurs à l’aide de teintes uniques. Tantôt baignées de bleu (pour les séquences fantasmagoriques), tantôt de rouge ou d’ocre, ces ambiances monochromes sont trop systématiques pour séduire pleinement. Surtout, ces teintes dénaturalisent les contextes pour amplifier de manière artificielle l’angoisse ou les états d’âmes des protagonistes. Néanmoins, le dessin est l’atout incontestable de ce premier tome, car le scénario se dévoile de manière un peu laborieuse. Les personnages ne sont guère attachants et cette histoire ésotérique de possession, dialoguée correctement mais platement, est au mieux convenue, au pire encore bien hermétique…