L'histoire :
Le 18 août 1503 au Vatican. Victime d’un mal mystérieux, le Saint-Père Alexandre VI se meurt. Le 19 août, l’ombre du diable plane sur l’état pontifical alors que la ville de Rome plonge dans la débauche : fornications et soûleries se multiplient dans les ruelles. Le 20 août au matin, Rodrigo Borgia, le pape défunt est enterré, quand se réveillent le cardinal Della Rovere et l’éphèbe Aldosi, son jeune amant. Après avoir trinqué, Della Rovere explique à Aldosi comment il est parvenu à diluer du poison dans le calice du pape au cours d’une réunion entre cardinaux et il lui explique que parfois, il faut savoir perdre pour gagner. Afin de préparer le conclave, Della Rovere se rend chez le cardinal Francesco Piccolomini Todeschini. Au cours de l’entrevue, le cardinal accompagné du jeune Aldosi, n’hésitent pas à user de moyens pour le moins équivoques afin d’obtenir le futur héritage de Todeschini. A la fin du premier conclave, un nouveau pape est élu, il s’agit du cardinal Todeschini… Mais Della Rovere entend bien lui prendre le Saint Siège en restant fidèle à sa stratégie machiavélique…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le dessinateur Théo nous emmène dans les arcanes du Vatican avec un réalisme époustouflant et c’est sans doute là la grande force de ce premier tome, d’une beauté et d’une précision exemplaires. Les expressions de visage traduisent à merveille la duplicité et le cynisme de personnages navigant entre hypocrisie et arrogance (en particulier Della Rovere). Le trait et les couleurs chaudes font brillamment ressortir la nature impudente des protagonistes. Le dessin se conjugue à un scénario sans concessions. Œuvre du célèbre Alessandro Jodorowski (Bouncer, Alef Thau), la narration ne nous épargne aucun travers de la nature humaine. Les personnages de cette histoire, hauts en couleurs, sont en effet présentés sous les traits les plus vils, chacun symbolisant un aspect méprisable de notre nature. Jodorowski, en chef d’orchestre aguerri, ne ménage pas l’Eglise : les clercs sont cupides, dépourvus de morale et mus par la recherche des plaisirs charnels ! Bref, le récit fait volontairement dans la démesure puisque Jodorowski cherche à nous montrer l’Eglise de la Renaissance comme une grande mafia, avide de richesses (grâce aux indulgences) et habitée par la volonté d’accéder au Saint Siège. Le scénariste s’appuie bien évidemment sur une trame historique véridique, même s’il n’hésite pas à broder et à en rajouter des louches, ce qui finalement confère au scénario une tonalité peut-être excessive (mais assumée). Pour Jodorowski, « une BD est un roman en images, donc (il) se donne toutes les libertés du monde avec l’Histoire ». Ponctué de rebondissements aussi inattendus qu’amusants, le récit est très rythmé, haletant et l’album se lit d’une traite.