L'histoire :
Enfermé dans une cellule dépouillée d’un hôpital psychiatrique, Thomas M, trouvé il y a 3 ans errant et atone dans la rue, psychote en discutant avec une araignée. Soudain, un homme ouvre la porte, pénètre dans la cellule et écrase l’arachnide… Un peu plus tard, la police retrouve ce dernier égorgé dans une mare de sang, tenant un morceau de verre à la main, devant la cellule ouverte et vide. Le plus étrange, c’est que l’autopsie confirme que l’homme s’est fait ça lui-même. Le légiste repère également un signe distinctif : il a une araignée de tatouée sur le poignet. La jeune inspecteur Lotte S. Habou, aussi coriace que virulente, se met sur l’affaire, secondé par un inconnu imposé par le ministre en personne. Bien sûr, le dément Thomas M s’est évadé… Ce dernier ignore sa réelle personnalité est-il réellement un tueur ? Il se sait juste germanophone et… hypnotiseur ! Son premier acte en liberté consiste à rendre visite à un bouquiniste spécialisé en cinéma. Il lui montre un fragment d’une pellicule de film (un photogramme), pour authentification. Erudit en la matière, une loupe à la main, le vieux libraire n’hésite pas une seconde : il s’agit d’un morceau de l’introduction du Docteur Mabuse de Fritz Lang, autocensurée par ce dernier dans les années 20, et censé ne pas exister. Cette relique étant évidemment hors de prix, il lui donne l’adresse d’un riche collectionneur…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Diable ! Que d’énigmes ! Jean-Pierre Pécau, prolifique scénariste qui a établi ses quartiers chez Delcourt, nous a habitués au meilleur (Nash, Empire…) comme au pire (L’histoire secrète…). Aux côtés de Sébastien Damour, il semble toutefois se surpasser et nous propose aujourd’hui un thriller d’ambiance aux frontières du surnaturel. La mise en bouche de la trilogie prévue utilise à merveille les ingrédients du genre, en une intrigue noire parfaitement piquante. Sans en dire de trop (il est trop tôt pour tout expliquer), cela parle d’un serial-killer, d’une démence meurtrière, d’une mystérieuse séquence d’un film de Fritz Lang. Car surtout, cette histoire est habitée de l’œuvre de ce cinéaste, l’un des plus grand du XXe siècle, réalisateur de films tels que… tiens tiens… Les araignées, M le maudit ou un certain Le testament du Docteur Mabuse… Mais il y a aussi du David Lynch à travers ces multiples trames et cette clique de personnages étranges et hauts en couleurs (femme fatale nymphomane, collectionneur véreux, spécialistes en serial killers, fliquette lesbienne…) qui s’animent néanmoins de manière parfaitement limpide. Le tout est très agréablement dessiné par un Damour en forme, qui œuvre ici dans un registre contemporain, a contrario de ses précédents albums futuristes (Nash, Le silence de la terre, Pandora Box). Personnages et décors sont travaillés, peaufinés et précisément mis en scène à travers un travail d’ambiance idoine. Un bel hommage à un cinéma de genre, qu’on est impatient de démêler…