L'histoire :
Dans un salon de coiffure, un bel écran retransmet la préparation d’un match de tennis. La fille de la coiffeuse emmène ses petites copines dans le salon pour voir le match. Un petit garçon réclame une coupe de cheveux, la même que les grands-mères à côté de lui… Et la même que le n°1 mondial, invaincu depuis son entrée à l’ATP, Max Winson. Il n’a rien d’un monstre. Dégingandé, il semble un peu perdu en entrant sur le court. Et puis, raquette en main, il devient une machine qui écrase son adversaire, sous le regard de son père et les vivas de la foule. Il est littéralement adulé, c’est un repère, un modèle pour les gens. Il termine le match comme il l’a commencé, souriant, sans trahir de fatigue ni de souffrance. 25ème grand chelem d’affilée, cet homme est un géant. Mais son père, entraîneur et mentor, montre des signes de fatigue et de maladie. Dès lors, le monde de Max va vaciller et trembler sur ses bases. D’autant qu’il est touché par les mots très durs d’une jolie journaliste…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Coupé du monde, tyrannisé par son père qui le force à jouer jusqu'à l’épuisement, Max Winson est un jeune génie du tennis qui tape plus souvent la balle qu’il ne respire. Il ne connaît de la vie que le court de tennis et l’exigence de son père qui le pousse à rechercher la perfection dans son jeu. Cette petite (mais énorme) BD fait froid dans le dos et pousse à réfléchir sur de nombreux thèmes. Ce n’est pas un hasard si Jérémie Moreau rend hommage à Albert Jacquard dans ses remerciements. Tant de questions sur l’humanité dans cet opus ! Sur la capacité d’un être humain à encaisser, déjà. Encaisser les souffrances physiques et morales, à endurer l’isolement. La vie entière de Max Winson est une torture. Il vit dans une prison dorée, aidé par l’amour que lui porte son majordome, mais enfermé par la haine de son père… Et comment ne pas être choqué par l’inhumanité de son père, qui jusqu'au bout de sa maladie, ne cherche que la victoire pour son fils et ne prononce plus que ce mot jusqu'à la fin… Moreau n'oublie pas l’économie qui gravite autour de lui, la fascination des gens, etc. La tentation de la défaite arrive chez Max après s’être fait humilier par une journaliste, qui juge avant de chercher à comprendre. On sent déjà cette fragilité dès les premières pages, il est fragile au dehors, indestructible sur un court. Mais est-il devenu pour autant une machine inhumaine comme le souhaitait son père ? Winson, le fils qui gagne… Les bonnes idées pullulent : le concept de la machine à balles qui s’ouvre, quand l’entraînement est terminé, pour devenir un lit pliant, est à breveter ! Le noir et blanc très simple et dynamique de Moreau cadre parfaitement avec le type d’histoire et son découpage. Notamment l’utilisation des gros plans, l’alternance entre les grandes et les petites cases, les découpages savants et explosés... tout contribue à accorder un rythme haletant au récit, qui se lit en un éclair, aussi vite qu'un passing-shot. Ça aurait pu être un one-shot, mais on attend avec plaisir la suite !