L'histoire :
Le 22 mai 1670, le roi Louis XIV n’a que 22 ans, mais il impose déjà sur sa cour et son entourage une déférence quasi divine à son encontre. En visite à la citadelle de Lille, il annonce à son fidèle d’Artagnan qu’il va nommer Vauban gouverneur et qu’il envisage de lui confier ensuite cette charge. En effet, trois ans plus tôt, d’Artagnan avait fait montre d’un courage insensé lorsque les troupes royales avaient donné l’assaut final contre la ville tenue par les espagnols. Il se souvient encore que lorsqu’il était enfant, d’Artagnan avait toujours été un protecteur zélé doublé d’un excellent maître d’escrime. Aujourd’hui, celui qu’on n’appelle pas encore le Roi Soleil tient en haute considération d’Artagnan, qu’il a nommé capitaine-lieutenant de la 1ère compagnie des mousquetaires à cheval, mais qui s’est octroyé le titre de « comte ». A Lille, Louis XIV passe donc en revue ses troupes et ses dames de cours. Car en plus de sa femme Marie-Thérèse d’Autriche et de ses deux maîtresses – la duchesse de la Vallière et la marquise de Montespan – il voue également un intérêt diplomatique à Henriette d’Angleterre, la sœur du roi britannique. Au même moment, le jeune Alexandre de Bastan noie son désespoir dans l’alcool, car il n’a plus revu son grand amour Eloïse de Grandville depuis plus de 4 ans…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme l’indique le titre de ce 3ème opus de Mousquetaire, l’intrigue se situe cette fois dans l’entourage proche de Louis XIV, de son nom de baptême Louis-Dieudonné de France. Sa relation tortueuse avec ses maîtresses et son rapport de confiance avec d’Artagnan fondent le gros de l’intrigue. L’on voit évidemment aussi réapparaître le personnage « héros » (ou disons fil rouge) de la série : le jeune mousquetaire Alexandre de Bastan, qui se montre sous un jour peu reluisant… mais fondamentalement humain. Car cette époque voit aussi apparaître une puissante jacquerie dans le Vivarais, notamment dans la ville d’Aubenas, où des bourgeois sont massacrés. Les désastres climatiques cumulés aux levées fiscales ont raison de l’humeur des paysans, qui se regroupent derrière le leader Jacques Roure. Il est d’ailleurs saisissant de découvrir le traitement de ce sujet en marge de l’actualité des gilets jaunes du début d’année 2019. Et pourtant, le scénariste visionnaire Fred Duval l’a forcément écrit bien en amont de son déclenchement. En 1670, les forces de police (les mousquetaires) ne s’embarrassaient guère de flashball ou de grenades de désencerclement pour réprimer les révoltes. On assiste en effet dans cet album à divers massacres légitimés, avec la tête coupée du leader exposée aux portes de la ville. On dira ce qu’on voudra, notre humanité a beaucoup progressé en 350 ans, quand bien même il reste du chemin à faire. Le dessin est une nouvelle fois assuré par Florent Calvez, qui fait plus que le job avec un traitement réaliste documenté, soigné et détaillé, toujours juste dans les proportions, les mouvements et les décors variés. Mention spéciale à l’illustration de couverture façon gouaches (par Ugo Pinson), digne des grands portraits de l’époque.