L'histoire :
L’argent est essentiel à la conquête du pouvoir. Ce postulat de base est indiscutable, en particulier lors des campagnes d’élections présidentielles françaises. Pendant des années, l’argent a circulé dans des valises aux origines diverses et douteuses. Les partis politiques se servaient de commissions sur des contrats d’armement, de grandes entreprises ou de dirigeants étrangers pour financer les campagnes électorales. De nombreuses affaires ont ainsi été dénoncées, décortiquées et expliquées, comme les fonds africains, l’affaire de l’office HLM des Hauts de Seine, les fonds spéciaux de Matignon... De 1958 à 1988, 20 propositions de loi ont essayé de réglementer le financement des parti... et le comble, c’est qu’aucune n’a été adoptée. Il ne faudrait évidemment pas se tirer une balle dans le pied. Ce status quo est maintenu jusqu’aux fameuses révélations sur le scandale de l’affaire Luchaire en 1987, où le parti socialiste touchait des commissions sur les armes vendues illégalement à l’Iran. Pris les mains dans le pot de confiture, le gouvernement Miterrand a proposé une initiative qui, même si le PS était majoritaire à l’assemblée, n’a pas été adoptée. Par contre, une loi d’amnistie a été votée en juillet 1988 qui présentait l’avantage d’effacer tous les délits politico-financiers...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour le coup, il est difficile de dire que les politiques n’ont pas d’imagination. Quelle créativité pour passer sous les radars, contourner la loi ou s’auto amnistier. Certaines manœuvres sont dignes du génie. Les commissions sur les HLM des hauts de Seine, la vente d’arme illégales, les emplois fictifs, la création d’une commission de contrôle des comptes incompétente, l’affaire Bygmalion de sous-facturation, le remboursement des frais de la campagne électorale, les assistants parlementaires financés par l’Europe et qui n’ont jamais vu Bruxelles... cette liste non exhaustive d'affaires entachant le microcosme politique français est presque banale, car redondante. Il n’y a pas une année sans scandale financier. Et affirmer que « le changement c’est maintenant », c’était hier ! Au regard de ces scandales en chaine, le peuple français se détourne de la politique. Le slogan « tous pourris » est sûr de nombreuses lèvres. C’est le naufrage de la démocratie et les politiques ont leurs parts de responsabilité. Les journalistes Elodie Guegen et Sylvain Tronchet ont réalisé un énorme travail d’investigation et de vulgarisation pour cet album. Les affaires sont expliquées et les ficelles des montages financiers décrites. La maison de verre voulue par Bartolone en 2012 – en parlant de l’assemblée nationale – n’est pas encore translucide. Des efforts ont été faits, mais le contournement de règles ou de lois est un sport national, en France. A moins qu'il ne s'agisse de phobie administrative généralisée. L’environnement graphique est bien évidement caricatural et le trait plutôt réaliste d’Erwann terrier permet de naviguer entre les différentes affaires de façon fluide. On identifie facilement le politique en question. D’ailleurs la case « intouchables » de la planche 144 est une perle à elle seule. Cet album est donc la synthèse d’un très gros travail d’investigation journalistique, vulgarisé afin de comprendre les différentes affaires politico-juridico-financières de ces quarante dernières années.
