L'histoire :
Le palais s’éclaira d’un seul coup à sa plus haute terrasse, la porte du milieu s’ouvrit, et une femme, la fille d’Hamilcar elle-même, couverte de vêtements noirs, apparut sur le seuil. Elle descendit le premier escalier qui longeait obliquement le premier étage, puis le second, le troisième, et elle s’arrêta sur la dernière terrasse, au haut de l’escalier des galères. Immobile et la tête basse, elle regardait les soldats. Sa chevelure, poudrée d’un sable violet, et réunie en forme de tour selon la mode des vierges chananéennes, la faisait paraître plus grande (…). Puis salammbô, sans s’arrêter, raconta comment Malkarth, après avoir vaincu Masiabal, mit à la proie du navire sa tête coupée. – « A chaque battement des flots, elle s’enfonçait sous l’écume ; mais le soleil l’embaumait, elle se fit plus dure que l’or ; cependant les yeux ne cessaient point de pleurer, et les larmes, continuellement, tombaient dans l’eau. »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Conjointement à la réédition intégrale, aux éditions Drugstore, de sa trilogie Salammbô, Philippe Druillet est revenu sur le sujet et commit, en 2009, 42 portraits dénudés de la fille d’Hamilcar. 42 portraits reproduits ici et apposés, page après page, au texte de Flaubert décrivant l’égérie : son apparence, ses appétences, son isolement, sa destinée, sa fin, etc. Cet album intitulé Les Nus propose de fait un appendice à l’œuvre originale, un regard – une attention accrue – renouvelé sur le personnage de Salammbô. D’une plastique européenne relativement classique (cf. photographies de l’œuvre originale), la belle est devenue africaine, comme transformée par sa quasi-divinité. Ses caractères sexuels sont mis en avant : la générosité de ses seins, la volupté de ses courbes, les accessoires « phalliques » l’environnant... Essence même de la femme, symbole de la fécondité, obsession du désir masculin : Salammbô est tout cela et plus encore à la fois. Le caractère obsessionnel du propos transparaît par ailleurs dans une certaine redondance de ces Nus. D’une qualité graphique indéniable, tour à tour baroques, érotiques et/ou flamboyants, ces portraits auraient peut-être gagnés en plus de diversité. Reste que cet illustré ne manquera pas de vous subjuguer et de prolonger, avec plaisir, l’intégrale magistrale que vous aurez acquis de concert.