L'histoire :
Jules est un petit garçon du cours préparatoire de la ville de Saint-Nazaire. Aujourd’hui, c’est la rentrée des classes mais il n’ira pas. Solitaire et réservé, Jules est jaloux du cartable remis à neuf de son grand frère Paul. Surtout, Jules se languit de lui : Paul est parti à la grande école à Nantes, si loin… Après avoir croisé Jojo Pénot et sa charrette puis Madame Mussino, l’épicière, après avoir traversé champs et broussailles, la nuit est venue. Arrivé au bord de la jetée au bout du port, Jules s’est assis, pensif. Son papa est ensuite arrivé. Et, sans rien dire, il l’a pris dans ses bras, affectueusement… Les années ont passé et, naturellement, Jules a grandi. Mais les personnages de son enfance semblent immuables, comme gravés dans sa mémoire. Il y a Mémé Mélie qui habitait le Marais. Jules a habité un temps chez elle. Mémé Mélie, c’était son « amie secrète » (sic). Il lui racontait comme l’interrogeait sur tout. Et puis, il y a Gégé, le copain de son père. Les dimanches, ils passaient à la maison. Quand Paul était là, tous deux s’entraînaient au calcul. Gégé travaillait en vue d’une promotion. Il espérait devenir tourneur ! Car à Saint-Nazaire, tous ou presque travaillaient aux Chantiers. Un sacré boulot qui exigeait de la condition. Mais un matin, le maître de Jules interrompit la classe : les Chantiers étaient arrêtés. Tout Saint-Nazaire était en grève !…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Aujourd’hui, [Jules] se rappelle (…) ». Ainsi commence (pour exemple) la page 14 de cet album pour mémoire, second de la collection L’Histoire sensible aux éditions de l’Atelier. Après Jeanne de la zone remarqué par la critique, voici Jules des Chantiers, peinture d’une géographie nazairienne à l’époque où la ville – de Saint-Nazaire, donc – vivait pleinement au rythme des fameux Chantiers de l’Atlantique. Retour sur un parcours de vie, d’enfant, en compagnie du petit Jules qui grandit solitaire pour son âge et cependant bien entouré, « riche » des figures de ses proches. Trois parties arrêtées : une histoire illustrée, un lexique avec photographies à l’appui, puis un dialogue pour finir entre Jules aujourd’hui et sa petite-fille. Scrupuleusement documentés, Frédérique Jacquet (déjà auteur des textes sur Jeanne de la zone) et Sébastien Vassant (auteur du délicieux L’Accablante apathie des dimanches à Rosbif) livrent un travail passionné. Sous la plume de la première, les personnes du commun deviennent des « personnages » de l’Histoire, au sens noble du terme ; sous les crayons du second, leurs traits s’expriment. C’est fou ce que son trait, pourtant simple, peut offrir d’expressivité, de force de figuration ! Peut-être l’histoire manque-t-elle d’un ressort autre que chronologique, autre que la maturation de Jules au fil des ans ?... Jules des Chantiers recèle en résumé une mine d’informations comme d’émotions. D’accès cependant difficile aux plus jeunes, à moins d’être accompagnés : aux plus grands de jouer !
