L'histoire :
Ce jour, Sara recevait son formulaire d’admission à la Rose. Un établissement « sélect » accueillant une minorité de privilégiées parmi les jeunes filles désireuses d’y entrer. L’école avait ses règles strictes et incontournables. Pour demeurer dans ce cadre incomparable, il fallait à ses résidentes respecter un ensemble de codes, de rites parfois singuliers. Mais Sara était prête à s’y plier. Et lors de son premier jour à la Rose, alors qu’elle découvrait le jardin, Sara trouva une écharpe oubliée dans un arbre. L’objet appartenait à Silje, une élève que l’on appelait « l’élève-clef » – pour une raison encore inconnue de Sara – et avec qui la nouvelle allait très vite s’attacher au point de devenir « sœurs de sang » (…). La quinzaine de jeunes adolescentes qui composaient l’unique classe de ce petit monde clos apprenaient à collecter les racines des plantes. Chacune exaltait une essence particulière conservée précieusement. Les non-dits étaient nombreux. Et quand l’une des pensionnaires enfreignait une règle, elle passait devant le conseil de ses paires qui statuait sur son sort et son possible renvoi…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jeune Barcelonaise encore dans sa vingtaine, Maria Llovet présente en ce début 2011, à l’occasion du 38e festival d’Angoulême, sa seconde publication française après Linked (paru l’hiver dernier aux Humanoïdes Associés). La nouvelle venue dans le paysage BD hexagonal signe cette fois scénario et dessin – alors qu’elle n’assumait précédemment que ce dernier. One-shot N/B affichant quelques 140 pages, Eros / Psyché raconte l’histoire de Sara, nouvelle élève à l’école de la Rose, rapidement éprise d’une camarade prénommée étrangement Silje et présentée comme « l’élève-clef » de cet établissement singulier (cf. résumé). S’inspirant de l’ambiance précieuse et délicate des « shojos » nippons, l’ouvrage vaut sans doute plus par sa composition ensorcelante que par son intrigue longtemps imperméable (révélée en toute fin). Le mystère entretenu – par l’usage d’une numérotation singulière ou encore les non-dits nombreux, par exemple – installe une atmosphère onirique et évanescente qui fait tout le sel de l’album. Sensuel à l’image de la couverture, le trait de l’Espagnole présente aussi d’indéniables qualités d’expressivité ainsi qu’une grande sensibilité (fragilité ?). Le rythme narratif est posé. Maria Llovet prend le temps de son propos et ose les pauses et silences quand il faut. Métaphore possible de l’adolescence, variation initiatique autour de l’apprentissage du sentiment amoureux ou ouvrage transgressif (etc.), Eros / Psyché est tout cela et bien d’autres encore. Un récit d’un charme certain comme suspendu dans le temps et l’espace. A destination d’un public féminin privilégié mais pas seulement. Car attention, talent !
