L'histoire :
Juin 1940 – Au cinéma, les actualités Pathé projettent des images et commentaires étonnés : le IIIe Reich est vainqueur de la drôle de guerre. L’Allemagne revancharde du diktat versaillais humilie la France… Au secret, l’agent allié Marchand poursuit l’interrogatoire du traître anglais Benton, dans l’espoir d’en tirer quelques précieux aveux : l’incident de Mechelen-sur-Meuse le 10 janvier 40, la revanche de Verdun, la stratégie militaire allemande appelée Blitzkrieg, l’erreur du général Gamelin, chef de l’Etat-major français, resté au plan Schlieffen et à la ligne Maginot… Tout cela est connu ! Il faut des noms, les identités des agents doubles. Pour incompétence, les généraux français mériteraient d’être fusillés mais l’idée d’envoyer Hess négocier une paix séparée avec l’Angleterre afin de concentrer toutes les forces allemandes à l’Est en vue de Barbarossa, fut une erreur. Churchill préféra jouer la carte de Staline. Encore une erreur qui ne faisait que retarder l’échéance, car bientôt, les russes seraient nos ennemis. Qu’importe, cela n’excusera jamais les crimes nazis, la Solution finale décidée à Wannsee en janvier 42…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Hitler était-il un dictateur « faible » ? Lorsqu’on s’intéresse au nazisme, la question du charisme du Führer revient inlassablement. Ici encore, bien que n’apparaissant jamais, il est omniprésent : rien ne se décide sans son consentement. Heydrich, Himmler, Goebbels… Tous n’agissent qu’en son nom, répétant un salut impérial emprunté à la Rome antique en signe d’allégeance. Le travail préparatoire de Tarek dut être considérable tant l’articulation entre fiction et réalités historiques est insoupçonnable. La main de Sir Arthur Benton tire pour nous chacun des fils qui tissaient la toile de fond de la Seconde Guerre mondiale. Bien malin celui qui saura se jouer des faux-semblants. A devenir parano ! Tel Hitler qui se défiait de tous afin de parer à des attentats répétés. On raconte que Staline, lui, changeait de chambre chaque soir… Parce qu’aussi absolu qu’il soit, le pouvoir d’un dictateur est intangible, contesté et convoité. Militaires de la Wehrmacht et miliciens SS jouaient au chat et la souris, les uns désirant croquer le fromage, les autres le mettre sous cloche. Un jeu d’ombres et de lumières magnifiquement rendu par le dessin maîtrisé et expressif de Stéphane Perger. Ici, point d’encarts narratifs : tout ou presque, est dit de la bouche même des protagonistes, d’une réalité rouge sang, teinte de couleurs directes à dominante grise. Seul bémol : que ces « pâles » héros ne s’effacent parfois trop devant l’intelligibilité d’une Histoire complexe. Sans surprises ? Tout est écrit, déjà joué mais demeure méconnue. Pourquoi ? Une fantaisie meurtrière pour comprendre la folie génocidaire et l’encrer un peu plus dans les mémoires. Un thriller poignant à mettre entre toutes les mains. Parce qu’au sortir de la Première Guerre, on disait déjà : « Plus jamais ça ! »…