L'histoire :
D’un pas décidé, la mort approche d’une maisonnette isolée au bord d’une route de campagne pavée, sa faux à la main. Cette fois-ci, elle ne se laissera pas faire : elle est venue faire sa sale besogne, sur une cible bien précise (une vieille femme qui l’a déjà entourloupée), elle ne repartira pas sans. Mais c’est une autre vieille qui lui ouvre la porte, une amie qui garde la maison. L’autre est partie faire des courses en ville, va falloir repasser ce soir. Dépitée, la mort lui accorde le sursis de la demi-journée et revient toquer à la nuit tombée. Comme il n’y a pas de lumière, elle fait le tour de la maisonnée et passe par la porte de derrière, restée ouverte. Subitement la lumière s’allume : surprise ! 4 petites vieilles entonnent un « Joyeux anniversaire » qui laisse la mort pantoise. Et vas-y que j’te souffle les bougies, et vas-y que j’te fais sauter le bouchon de champagne, et vas-y que je te déballe mes cadeaux (un squelette en porte-clés, un bouquet de chrysanthèmes, une boîte à musique en forme de cercueil, une pierre à briquet pour aiguiser la faux, un sablier)… Au terme d’une bonne soirée dansante, la mort repart ivre et bonheur, un sourire jusqu’à l’occiput… quand elle s’aperçoit subitement qu’il est techniquement impossible qu’elle ait un anniversaire.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
De nouveau, la grande faucheuse – un squelette dans une toge élimée – promène son cynisme parmi nous autres mortels, accompagnée de son fidèle Lao Tseu – un cochon muet muni d’escarpins. Sur un ton débonnaire, à la fois féroce et tendre, elle écluse différentes victimes ou porte son propos métaphysique sur notre société décadente, avec un entrain légèrement désabusé qui n’appartient qu’à elle. De longueurs variables, les historiettes sont certes loufoques, cernant parfaitement la tonalité humoristique aigre-douce qui caractérise le cynisme, mais elles comportent des chutes diversement et moyennement percutantes : le gag n’est pas l’objet précis de la série, qui préfère miser sur le non-sens. Après tout, le décès est une telle aberration dans une continuité de vie, que sa mise en œuvre (ou non) est propice à moult situations absurdes. Outre ce sens humoristique finaud, la grande plus value de la série se trouve évidemment à travers les encrages en noir et blanc de François Boucq. Dessiner aussi bien que Boucq – entendez de manière aussi spontanée, réaliste et juste à la fois – ça n’est pas franchement donné à tout le monde. Voilà encore un simple mortel qu’on espère en fin de listing.