L'histoire :
Jean-Claude Tergal nous explique que tout a commencé à cause d’André Maginot, celui-là même qui donna son nom à la ligne de fortification inefficace, édifiée à la frontière est de la France dans les années 30. Car à cause de ça, l’Allemagne a envahi la France par le nord ; donc sa tante Héloïse a du s’exiler, enfant, en Bretagne ; or là-bas, un abruti l’a poussée dans les eaux glacées du port ; donc elle a écopé de problèmes respiratoires pour le restant de sa vie ; du coup, depuis lors, elle mange la bouche ouverte. Or Jean-Claude est totalement traumatisé par la vision des aliments broyés bruyamment devant lui, alors qu’il est à table. C’est pour cette raison que ce jour là, alors qu’il prend le train, il quitte son siège numéroté et réservé : car son voisin croque de la sorte dans un sandwich. Il émigre alors dans un wagon où il n’y a personne. C’est là que ce monsieur moustachu, dont il aurait du se méfier, l’aborde pour lui demander un service délicat : sa femme ayant pris de puissants somnifères, il fallait qu’il l’aide à la porter pour la descendre du train, au terminus de la gare du nord. En bon nigaud, Jean-Claude accepte. L’homme dépose l’épouse endormie sur le siège à côté de Jean-Claude et il s’éclipse « pour aller chercher ses bagages ». Moult fantasmes et souvenirs s’entrechoquent dans la tête de Jean-Claude. On dirait qu’il a une (vraie) copine endormie sur son épaule ! Or bizarrement, le type ne revient pas. Jean-Claude a alors une intuition : et si la femme était morte. Pour vérifier, il plonge sa main dans le col de son imperméable et colle sa main à sa poitrine. Oui, là, au niveau du sein gauche…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sous la plume grasse et épaisse de Didier Tronchet, le cador de la BD est de retour dans une histoire complète ! Toujours muni de son anorak doudoune rouge qui lui donne ce port altier à nul autre semblable, cette fois, Jean-Claude Tergal vit (vraiment) une incroyable histoire intime avec une femme… Précisons tout de même, à l’égard des rares qui ne connaissent pas la série (hérétiques !), que tout cela est ironique : Jean-Claude Tergal est sans doute le plus gros looser du 9a art. Il atteint des sommets inégalés en matière de nigauderie et possède la plus belle collection de râteaux de la création. Bref, un joyau de misère sentimentale à l’état brut. Ainsi, si dans ce 10e opus, il tient effectivement enfin une femme dans ses bras, c’est parce qu’elle est endormie, droguée… ou morte ! (pour le savoir, il faudra lire l’album). En pareille situation, imaginez l’entrechoc des fantasmes et des angoisses, dans un esprit aussi obsédé et bravache que le sien. Didier Tronchet fait ici vivre une anecdote exaltante à ce héros ordinaire, que chaque lecteur possède (un peu) en lui. Ledit lecteur se bidonnera quant à lui des hypothèses et extrapolations imaginées par Jean-Claude, du profit que ce couillon ose parfois tirer de cette conjoncture et de la tournure finale étonnante des évènements. Merci qui ? Merci Maginot !