L'histoire :
Naïm est un petit garçon kenyan de onze ans. Il vit avec sa tantine, une femme douce et chaleureuse, et Hassan, son grande frère qui passe ses journées à prier et à étudier le Coran. Ce dernier ne voit pas vraiment d'un très bon œil l'absentéisme croissant du cadet à la madrass, l'école religieuse du coin. Régulièrement, Hassan court après Naïm dans toute la ville afin de l'y emmener... en vain, car le garçonnet est rapide et très agile. Il passe ses journées, non pas à s'instruire, mais à chercher du quat, une herbe locale, qu'un homme très âgé consomme à l'intérieur de ses cigarettes pour se détendre et oublier ses vieilles douleurs. Surnommé « le Nacuda », le vieillard apprécie la compagnie de Naïm. Il lui raconte souvent des moments de sa vie, comme la fois où il a quitté le village pour devenir un marin. En ville, Naïm observe les touristes et s'amuse avec ses amis de la naïveté de certains. Parfois, il tombe aussi sur des étrangers sympathiques qui paient leur tournée. Le petit garçon s'étonne toutefois de différences notables, comme celles des femmes de son pays, qui doivent attendre d'être mariées pour fréquenter un homme, au contraire des européennes...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
De La ligne de fuite jusqu'à Kililana Song, Benjamin Flao invite inéxorablement le lecteur à voyager. Cet habitué des carnets d'illustration s'est détaché de Christophe Dabitch, le scénariste avec qui il a travaillé jusqu'ici, pour se lancer dans un diptyque en solo. Grand amateur de périples autour du monde, il a digéré les rencontres et les histoires dont ses rencontres l'ont enrichi. Sur ce premier album, on suit plusieurs personnages. Le premier d'entre eux est Naïm, un petit garçon de 11 ans qui n'a que faire de l'école et la religion. En ville, où il erre toute la journée, il croise d'autres protagonistes, comme le Nacuda ou des touristes issus du vieux continent. Par l'intermédiaire de ces derniers, Flao évoque le phénomène grandissant du néo-colonialisme : de riches voyageurs européens acquièrent de sublimes propriétés au milieu d'une population paupérisée. Ce récit chorale est un véritable appel au voyage. Le rythme lancinant de la lecture nous immerge de plus en plus profondément dans une atmosphère atypique. Le dessinateur a toujours été brillant sur ses compositions. Sur Kililana Song, il a encore gagné en lisibilité et fait de ses superbes illustrations une véritable bande dessinée s'appuyant sur une belle fluidité de narration. De sublimes doubles pages laissent une large place à la poésie. Ne refusez pas cette délicate invitation, d'une justesse rare et synonyme d'un petit moment de bonheur. Plus qu'une lecture, un accomplissement.