parution 10 mars 2021  éditeur Futuropolis  Public ado / adulte  Mots clés Chronique sociale / Economie / Politique / Reportage-BD

Le Choix du chômage

Le chômage n’est pas une fatalité, c’est un choix de société, dicté par le néolibéralisme et opéré par tous les responsables politiques français depuis 50 ans : telle est la thèse de cette BD-reportage pointue, ardue et touffue.


Le Choix du chômage, bd chez Futuropolis de Collombat, Cuvillier
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Grey Star Grey Star

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    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Grey Star Grey Star Grey Star

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  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

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©Futuropolis édition 2021

L'histoire :

Lors d’un diner au festival Quai des Bulles (octobre 2016), Benoît Collombat expose à son éditeur Claude Gendrot qu’il aimerait faire un reportage-BD sur les choix politiques, économiques et financiers qui ont abouti à l’explosion du chômage en France. Voisin de table, Damien Cuvillier ajoute qu’il est intéressé pour s’occuper du dessin. Le sujet du chômage l’intéresse, car ce fléau a accompagné sa mère durant toute son enfance. Le souci avec une telle matière, c’est de savoir par quel bout la prendre ! Depuis que le chômage est devenu une question préoccupante, en 1974 (Pompidou annonce 400 000 chômeurs), sept Présidents de la République ont eu à l’affronter… ainsi qu’une kyrielle de ministres, conseillers et autres « visiteurs du soir ». Comment retracer idéalement les moments de bascules historiques ? Les auteurs débutent une longue enquête qui commence au printemps 2017 pour se terminer à l’automne 2020. Ce thriller économique inextricable ne s’adressera évidemment pas vraiment aux jeunes. Leur thèse de départ : il faut qu’il y ait beaucoup de chômeurs et de précaires pour que le coût du travail ne soit pas trop élevé et ainsi que les actionnaires des entreprises gagnent plus. Les acteurs et commentateurs de cette politique s’appellent Jacques Delors, Edouard Balladur, Jacques Attali, Alain Minc, Robert Marjolin, Jean Monnet, Jean-Pierre Chevenement… Mais le responsable numéro 1, c’est le néolibéralisme.

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Par leur titre provocateur, le journaliste Benoît Collombat et le dessinateur Damien Cuvillier annoncent clairement leur théorie de rupture avec le paradigme habituel : en France, le chômage n’est pas une fatalité, c’est un choix. Un choix des gouvernements qui se sont succédé depuis que ce fléau est apparu (avec la crise pétrolière des années 70). Ainsi, de Pompidou à Macron, tous les chefs d’Etat, premiers ministres et ministres de l’économie et du travail qui se sont relayés sur la destinée de notre pays, de toutes tendances alternées, devraient assumer cette « volonté ». Ou, plus insidieusement, le vrai responsable, c’est le néolibéralisme et la facilité avec laquelle il s’est engouffré à tous les niveaux de notre économie : balance commerciale, capacités de productions, finance internationale, politiques monétaires, réformes sociales, construction européenne, alliances diplomatiques… Autant d’étapes prépondérantes qui ont participé de cette « solution » : favoriser l’économie, la finance, voire la stature internationale, au détriment du travail. Si sept présidents ont succédé à de Gaulle sous la Vème République, Collombat cerne principalement les années Mitterrand, avec Jacques Delors en grand horloger (Ministre de l’économie et des finances, puis Président de la Commission Européenne). Mais il n’est certes pas le seul ciblé… Cette lecture du monde depuis trois quarts de siècle est un parti-pris qui dénie quelque peu le dictat de la mondialisation et de nos économies interconnectées. En effet, nos responsables politiques avaient-il réellement le choix ? Pour détourner Churchill, peut-on avancer que le capitalisme est le pire des systèmes à l’exception de tous les autres ? En outre, considérer frontalement le chômage comme un choix, participe de théories complotistes qui n’avaient guère besoin qu’on en rajoute (l’Etat nous manipule !). Au-delà de tout abondement sur la thèse des auteurs, ces derniers se sont tout de même lancés dans un reportage BD particulièrement ardu et touffu... qui donne régulièrement le sentiment d’être décousu. Leur enquête est archi détaillée, elle mélange les époques, noie les arguments et les discours de centaines de témoins dans des narratifs souvent redondants et techniques (ex : l’inflation est un phénomène en apparence simple, mais très complexe dans tout ce qu’il implique)… Une véritable anti-vulgarisation en BD, aussi longue (près de 280 pages !) qu’éprouvante. La contribution d’un vrai scénariste de BD pour organiser et délayer l’énorme travail documentaire de Benoît Collombat n’aurait pas été du luxe. On retient tout de même, comme toujours, le très joli dessin aquarellé de Damien Cuvillier. Son lavis réaliste se borne certes majoritairement à dessiner les protagonistes (personnalités publiques et politiques, économistes et journalistes) en train de témoigner, mais il tient la longueur et parvient à varier parfois légèrement son style, pour insuffler un minimum de rythme, lorsque les besoins plus caricaturaux ou les flashbacks le réclament.

voir la fiche officielle ISBN 9782754825450